Mode, costumes a Paris
Cette rubrique vous invite à découvrir la mode, le costume, le vêtement d'autrefois à Paris, consignant les modes des Parisiens d'antan, leurs costumes, leurs robes, leurs vêtements, chapeaux, gants, chaussures, gilets, corset, jupons, pantalon, jupes, les accessoires tels que l'ombrelle, le parapluie, le sac, les lunettes etc., ou encore les coiffures.
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LES PARISIENNES DE 1840 à 1850
(D'après Les Modes de Paris 1797-1897, par Octave Uzanne, paru en 1898)

La fashion et les fashionables

A son entrée, toutes les lorgnettes se braquent sur elle ; il y a comme un

remous de têtes dans l'orchestre ; notre fashionable a fait son effet. Elle pose sur le bord de velours de sa loge son éventail de chez Duvélleroy, son bouquet de camélias fourni par Constantin, sa jumelle d'or fin, ses boîtes à pastilles ; elle fait entendre un frou-frou de soie et de velours, et, placée confortablement, légèrement renversée en arrière, elle commence, sans s'inquiéter de la scène, à faire l'inspection de la salle et du pourtour des loges.

De temps à autre, elle fait un petit signe discret, un geste coquet de la main ou un joli sourire de connaissance ; elle détaille complaisamment les toilettes, retrouvant ici ou là le talent d'Alexandrine ou de Mme Séguin, le bon goût de Brousse ou de Palmyre, le savoir-faire de Mme Dasse ou la manière anglaise de Mlle Lenormand.

Elle remarque beaucoup de représentants de la

fashion : lord et lady Granville, la princesse de Beauffremont, Mme Duchâtel et Rambuteau, la princesse Clémentine, Mme de Plaisance. Mme Lebon, Mme Aguado, Mme Le Marrois, la comtesse d'Osmont, etc.

Les femmes et les diamants étincellent à chaque loge, c'est là qu'est pour elle le spectacle ; que ce soient la Damoreau, Duprez ou Roger qui se montrent en scène, peu lui importe ! Toute son attention est accaparée par la composition de certaines loges ; elle essaye de deviner des intrigues, de compléter des anecdotes courantes, de créer des aventures galantes.

De temps à autre elle se renverse sur le dossier de son siège, demandant à l'une de ses compagnes :

– Connaissez-vous la personne qui est avec Mme X... ? – Comment ! Mme de Z..., toujours avec le petit Rubempré ?

Ou bien encore :

– Oh ! Ma chère, cela est inconcevable ; voyez un peu cette vieille marquise de C... qui minaude scandaleusement avec ce jeune blanc-bec..., elle n'attend donc pas qu'ils soient formés.

La lionne reste peu à l'Opéra ; elle compte achever la soirée au faubourg Saint-Germain ou à la Chaussée-d'Antin dans un bal ou un thé intime ; elle mettra quelques louis à la bouillotte, dévalisera un buffet ou lunchera copieusement, et, vers deux heures du matin, elle regagnera son hôtel et se couchera sans avoir trouvé une heure pour penser, pour rêver ou pour aimer.

Toutes ses journées se ressembleront ; le lendemain, elle reprendra le même train, toujours active, agissante, surmenée physiquement ; elle ne songera qu'à

la correction, qu'au bon ton du jour, au New fashioned ; son mari, ses enfants tiendront moins de place que ses chevaux dans sa vie ; pour ce qui est de son coeur, il est solidement horlogé et à mouvements réguliers ; ni lion ni dandy n'arrêteront ou ne précipiteront son mouvement.

L'amour en 1840 ne se rencontre plus guère que dans la bohème étudiante et dans le populaire ; on le retrouve dans les idylles champêtres si joyeusement décrites par Paul de Kock, ou bien encore dans les frissonnantes pages de Murger, mais lions et lionnes ne l'admettaient point.

Le lion se donnait le genre d'être sous le charme de sa Panthère, de son Léopard ou de son Rat ; la lionne reposait satisfaite dans sa force sportive et son coeur était aussi ordonné que le pouvaient être ses écuries, mais elle ne permettait pas qu'on y mangeât familièrement au râtelier.

En réalité, et pour nous résumer, en 1840, le dandysme et la fashionabilité établirent dans la société un cant, ou plutôt, comme nous disons aujourd'hui, un snobisme d'autant plus insupportable qu'il était artificiel et parodiait avec outrance les moeurs affectées d'outre-Manche.

Singerie n'est pas ressemblance, et comme l'écrivait, après Carlyle, J. Barbey d'Aurevilly, on peut prendre un air ou une pose, comme on vole la forme d'un frac ; mais la comédie est fatigante, le masque cruel effroyable à porter.

Lions et lionnes n'eurent qu'un faux reflet de dandysme ; ils sont un peu justiciables de la caricature, et Gavarni, mieux que personne, a fixé leur ridicule dans les meilleures compositions de fine mise en scène de son curieux guignol humain, ? Paraître ou ne pas être fut la devise de tous ces pantins.

Nous n'essayerons pas, toutefois, à leur sujet, de verser dans la philosophie de cette page pittoresque de notre histoire sociale.



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