Rues et places de Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de l'histoire des rues et places de Paris : comment elles ont évolué, comment elles sont devenues le siège d'activités particulières. Pour mieux connaître le passé des rues et places dont un grand nombre existe encore.
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RUE VALETTE (RUE DES SEPT VOIES)
Ve arrondissement de Paris

(Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, Charles Lefeuve, 1875)

Notice écrite en 1860. Commençant : rue de Lanneau, 1, et rue de l'Ecole Polytechnique, 19 bis. Finissant : place du Panthéon, 8. Historique : précédemment, rue des Sept Voies. Elle existait au XIIe siècle ; Guillot, en 1300, la nomme rue de Savoie. Origine du nom : Claude Denis Auguste Valette (1805-1878), jurisconsulte ; voisinage de la Faculté de Droit.

Peu de temps après, l'Image-Notre-Dame et la Madeleine passaient Petit-Saint-Jean, et la Bible-d'Or, Gràce-de-Dieu.

Le collège des Grassins, dont l'historique est présenté dans la notice de la rue des Amandiers-Sainte-Geneviève (maintenant rue Laplace), avait été passagèrement en possession de la Ville-de-Barcelone, que lui avait vendue en 1634 la veuve de Michel Charpentier, sieur du Plessis, mais qu'avait rachetée dès 1636, par retrait lignager, l'avocat Brisson, qui dans la même année avait eu Cristophe Descourtieux pour acquéreur. Michel Charpentier tenait ce bien de sa mère, née Marie Boissart, fille et héritière de Boissart, conseiller au parlement, et de Marguerite Chapelain, y succédant à Jean Chapelain. Mais le même manoir avait appartenu à des ducs de Bretagne, comme l'hôtel d'Albret, à l'origine, et cela remontait, pour le moins, à l'époque de la guerre des Deux-Jeannes. Le mariage de Charles de Blois, neveu de Philippe de Valois, avec Jeanne de Penthièvre, nièce de Jean III, duc de Bretagne, qui le choisit pour successeur, donna lieu à de sanglantes querelles, que les héritiers des compétiteurs firent durer un siècle. Ce souvenir historique retd fort peu surprenant que le séjour des ducs de Bretagne, au mont Saint-Hilaire, ait été dit de Blois, puis de Penthièvre.

Collège Montaigu. – Tout en a disparu, en 1844, pour faire place à la nouvelle bibliothèque Sainte-Geneviève. C'était, en dernier lieu, une prison militaire, qui avait servi d'hôpital. La suppression des classes n'y datait que de 1792. Ce qui nous a permis amplement de connaître un aimable vieillard M. Sauvage, qui avait fait ses études à Montaigu : il y était même entré en 1762, M. Regnard y remplissant les fonctions de principal.

La chapelle du collège renfermait le tombeau d'Ulrich Géring, l'un des trois imprimeurs attirés d'Allemagne par la Sorbonne pour fonder à Paris la première imprimerie. Le prédicateur Jean Standoutht, qui dormait sous les mêmes dalles, avait institué dans la maison, sous la direction d'une communauté, une école si pauvre que l'université n'avait rien de pareil : on y faisait un maigre, qui ressemblait par trop au jeûne, avec lequel il alternait toute l'année. Ce régent de la faculté de Théologie avait humblement débuté, en qu'alité de petit domestique. Le collège toutefois avait pour fondateur Gilles Aycelin de Montaigu : Il est fâcheux que ce chancelier, ancien archevêque de Narbonne, ait pris une part active à la persécution suprême des templiers. Mais ne se trouve-t-il pas qu'il est entré pour quelque chose dans l'éducation d'Erasme et de Calvin, puisque l'un et l'autre ont fait la moitié de leurs humanités à Montaigu ?

Collège Fortet. – La famille Perducet, dont nous ayons évoqué le patriarche en établissant les états de service d'un des quais de l'île Saint-Louis, fait le commerce des vins depuis un siècle ; elle a fourni à Sainte-Barbe plusieurs générations d'élèves, qui, pour entrer à la pension ou en sortir, n'ont jamais eu que la rue des Sept-Voies à traverser, dans sa largeur modeste. MM. Perducet y sont encore propriétaires aux n°s 19 et 21, de l'ancien collège Fortet, dont nous allons faire l'histoire.

Pierre Fortet, né à Aurillac, archidiacre de Cussac et chanoine de plusieurs églises, ne multipliait sur sa tête les bénéfices au XIVe siècle qu'en vue de faire le plus de bien possible. La preuve suprême en fut donnée par ses dispositions testamentaires, qui fondaient un petit collège avec huit bourses sans compter les offices, en laissant des maisons dans différents quartiers de Paris, ainsi que des rentes, des fiefs et des terres, avec la liberté pour ses exécuteurs testamentaires d'établir le collège où, bon leur semblerait quand sa succession serait ouverte, et elle s'ouvrit le 22 avril 1394. Deux des propriétés de ville ainsi léguées reliaient la rue Saint-Jacques à celle des Cordiers ; nous en retrouvons au moins une, dont l'aspect vénérable sourit aux antiquaires, à travers deux petites portes, dont une cintrée, et qui égrène encore, comme un chapelet, ses deux escaliers à balustres, n° 3, rue des Cordiers : elle avait pour enseigne le Barillet. L'autre, qui a été refaite, montrait l'image de la Madeleine. Là fut d'abord créé l'établissement, transféré trois années plus tard rue des Sept-Voies, dans une maison acquise de Listenois, seigneur de Montaigu, moyennant 500 écus d'or, qui formaient, avec une vingtaine d'écus de pot-de-vin, comptés à un intermédiaire, 458 parisis.

La chapelle, qu'on ajouta vite à l'édifice en l'appropriant à sa nouvelle destination, se dédia à saint Géraud, autrefois seigneur d'Aurillac. La Corne de Cerf, propriété attenante, s'incorpora en 1493 à l'établissement, qui ne s'en défit qu'au XVIIe siècle : c'était bien un accroissement. Néanmoins les finances du collège de Fortet n'avaient pas prospéré pendant le premier siècle de son ère : ses rentes sur des particuliers en avaient trouvé d'insolvables ; ses placements sur diverses caisses avaient subi des quartiers de réduction ; l'une de ses maisons, sise rue des Prouvaires, avait été vendue menaçant ruine. La faute pouvait-elle s'en imputer aux maîtres ? La principalité de Fortet, à laquelle nommait le chapitre de Paris, en vertu d'un droit conféré par les statuts originaires, passait en l'année 1416 à Jean de Rouvrai, qui eut pour successeur Jean du Sellier ; mais le chapitre avait nommé, depuis deux ans, un procureur pour administrer les affaires, à la décharge du principal et du chapelain.

Le siècle suivant se montra plus favorable. Charles de la Rivière, comte de Dammartin, devait aux principal et boursiers, substitués aux droits de Pierre Fortet, 160 livres parisis : des procès intentés aux acquéreurs et détenteurs des biens du débiteur amenèrent à composition, après plus de 150 ans, l'un d'eux, M. de Harlay, qui se détermina à transporter au collège de Fortet, en 1566, 400 livres de renté à prendre sur celle de 1,000, que les prévôt et échevins lui avaient constituée en 1562 sur le clergé. Jean Beauchêne, grand-vicaire de Paris, avait fondé trois nouvelles bourses, en y appliquant l'abandonnement d'un moulin Martinot, sis à Eaubonne, à Andilly et à Margency, dans la vallée de Montmorency, et ce bienfaiteur était mort en 1566 ; Nicole Watin, principal de Fortet, en ajoutait deux autres, en 1574. Les testaments de Jean Froideval et de Crouzon, qui remplirent au même siècle les fonctions de principal, l'un avant l'autre après Watin, léguaient aussi de petites sommes, à titre de fondations d'obit dans la chapelle de la maison. Du temps de ce Froideval vint au collège pour la seconde fois Calvin : il y avait précédemment étudié en théologie, il en était sorti pourvu de bénéfices, bien qu'il n'eût pas encore vingt ans, et il avait été suivre des cours de droit à Orléans, en s'y perfectionnant comme helléniste.

Le second chef de la Réforme se démettait, en rentrant à Paris, de ses titres et revenus ecclésiastiques, et la savante montagne Sainte-Geneviève, grosse en tout temps des oeuvres du passé, se sentit mère d'idées nouvelles. Pierre Robert d'Olivetan s'y était lié avec Calvin, et l'université de Paris avait déjà des échos pour leurs voix. Une harangue de Michel Cop, qui n'en était pas moins que le recteur, fut dénoncée en 1533, et comme elle passait pour une leçon qu'il avait apprise de Calvin à réciter, on voulut s'en prendre à tous d'eux. Seulement l'étudiant de Fortet avait déjà quitté sa chambre, lorsqu'on vint l'y chercher ; le chanoine Maillet, frère du greffier en chef du parlement de Paris, lui donna asile en Saintonge, puis la reine-Marguerite, à Nérac. Après avoir prêché, du côté gauche, jusqu'à un changement de communion, la rue des Sept-Voies abonda dans le sens opposé, de l'autre côté de la rue ; Sainte-Barbe y devenant le berceau de la compagnie de Jésus.

Aussi bien l'université agissait officiellement, par des visites, sur la discipline de Fortet, et le parlement eut lui-même à s'immiscer dans ses querelles intestines. Charles de Goussancourt, quoique fait principal par les chanoines, se voyait disputer, la place par Jean Cinqarbres, que les boursiers lui préféraient : un arrêt de la cour ne tarda pas à annuler la nomination,de Goussan court, parce qu'elle avait eu lieu pendant l'office divin. Les agitations de la Ligue, avant d'avoir le royaume pour théâtre, se ménagèrent des coulisses dans le même établissement, où le fougueux ligueur Boucher, curé de Saint-Benoît, qui fut aussi recteur de l'université et prieur de Sorbonne, eut assez longtemps un asile : le conseil-général de la faction des Seize y tint ses premières séances, en 1583. Le xvle siècle compta donc avec le collège Fortet, qui se passionnait avec lui et entrait des premiers en lice, au lieu de garder la sage neutralité qu'aiment à observer tant de cuistres ! L'un des risques courus à ce jeu n'était-il pas de passer d'un extrême à l'autre ? La jeunesse, d'ailleurs, se renouvelait dans la pédagogie de la rue des Sept-Voies, bien r qu'elle ne cessât pas d'y être vaillante. Préoccupés de questions exté rieures ; ses écoliers prenaient moins vite leurs degrés ; les finances de l'école n'en allaient pas plus mal.

L'hôtel des évêques de Nevers, longeant le jardin du collège et ouvrant rue des Amandiers, ainsi qu'au carrefour de Saint-Étienne-du-Mont, avait été adjugé au profit du collège, en 1564. Quand, plus tard, l'évêque de Nevers voulut profiter des édits de 1608 et 1613, autorisant le réméré des biens ecclésiastiques aliénés pendant les guerres de religion, les acquéreurs lui réclamèrent judiciairement une somme trois fois plus forte que celle de l'adjudication, à cause des réparations qu'ils avaient faites dans la propriété ; et le vendeur préféra renoncer à toute revendication. Ladite propriété, dont les boursiers tirèrent pendant deux siècles le revenu, s'appelait cour de la Vérité du côté de la rue des Amandiers, où maintenant elle remplit encore les n°s 13 et 17, avec passage rue des Sept-Voies, 17. Du côté dé Saint-Etienne du-Mont, elle garda la dénomination d'hôtel de Nevers tant qu'elle put.

Une acquisition du même teims est représentée à nos yeux par un des deux immeubles de MM. Perducet : voyons-y Marly-le-Châtel, maison à trois corps de logis, vendue par Claude de Lévis, qui était seigneur de Marly, et que le séminaire des 33 avait quittée en 1637 pour passer à l'hôtel d'Alhiac, rue de la Montagne-Sainte-Geneviève. La corporation des relieurs, démembrée de celle des libraires en 1689, renforcée au siècle suivant par celle des papetiers colleurs, et reconnaissant pour patron saint Jean-Porte-Latine, avait là son bureau, qui payait loyer au collège. Autre maison encore et puis jardin, dans la même rue des Sept-Voies adjugés sous le règne de Henri III aux mêmes boursiers, qui n'en gardaient pas moins d'autres biens par la ville, et particulièrement rue Saint-Victor.

En 1610, restauration complète du collège proprement dit. Fondation de quatre bourses de plus deux ans après, par Claude Croisier, principal. Deux autres dues, en 1719, à Grémiot, chanoine de Castres. A cette dernière date, Bernard Collot exerce la principalité ; ce fonctionnaire, d'humeur trop processive, finit par être déclaré incapable d'ester en justice sans l'assistance de Lavigne, avocat, nommé d'office par la cour. Puis le collège Fortet est au nombre de ceux qu'on réunit au collège Louis-le-Grand, en 1764 : M. de Vernhes, le dernier principal, deux autres officiers et seize boursiers composent alors l'effectif constitutionnellement défrayé. Le grand-bureau de Louis-le-Grand administre ses biens, que la Révolution fait nationaux ; l'immeuble dur collège n'est adjugé à un particulier que le 12 juillet 1806.

Hôtel d'Albret. – Le manoir à Paris de Charles de Blois, duc de Bretagne, époux de Jeanne de Penthièvre, ayant passé à un ou plusieurs comtes de Blois, à un ou plusieurs comtes de Penthièvre, Jean de la Chesnaye n'en fut que partiellement donataire en l'an 1516. La moitié en constituait déjà l'hôtel d'Albret, qu'on ne disait plus de Blois que pour mémoire. Alain d'Albret, comte de Dreux, y commandait en maître ; mais était-il le vieux sire de ce nom dont le fils devait à un mariage la couronne de Navarre, ou n'était-il qu'un autre membre de la même famille ? Henri, roi titulaire de Navarre, héritait alors du Béarn ; mais ce grand-père de Henri IV n'en faisait pas autant du séjour que voici.

Main d'Albret y vendait en 1620 une place et une masure à Nicolas Barrière, procureur général de l'ordre religieux et militaire de la Merci, pour établir le collège de son ordre. Ce collège, au XVIIIe siècle, n'était plus que l'hospice de la Merci, infirmerie du couvent dont il reste des débris et des bâtiments rue de Braque et rue du Chaume. Dès 1793 a été mis en vente l'ancien collège de l'ordre.

Mais l'édifice qui donne en face de la rue du Four-Saint-Hilaire a-t-il, comme on le dit sur les lieux, fait partie du collège, tout en étant le siège d'une imprimerie royale pour la musique ? Ne serait-ce même pas l'ancienne, masure refaite, celle qu'avaient vendue à la Merci les parents du chef de la dynastie des Bourbons ? Deux escaliers à balustres de chêne, que nous avons l'heur d'y revoir, étaient déjà de mode surannée à l'époque attribuée par Germain Brice à la construction de la maison. D'après cet historiographe, la maison de la rue des Sept-Voies occupée de son temps, par Frédéric Léonard, marchand libraire et imprimeur ordinaire du roi, avait été bâtie en 1673, par son père, fameux dans la même partie. Bricé confondait, selon nous, une reconstruction aveu une construction, et des documents inédits viennent à l'appui de notre opinion. Avant l'année 1673, Frédéric Léonard avait déjà en cet endroit une maison et un jeu de paume, que lui avait cédé, à titre d'échange Claude Rotrou, conseiller et procureur du roi ; il y tenait d'une part aux grassins et aux religieux de la Merci, d'autre part à la maison de la Grande-Confrérie-aux-Bourgeois. Il faudrait donc dans le bel édifice reconnaître une réparation complète de la Chiche-Face. Quelle transformation avantageuse ! A coup sûr, la propriété était vendue en 1768 par Léonard des Malpeines, conseiller au Châtelet, et son beau-frère Chardon, maître des requêtes, intendant de marine, à Leguay d'Haute ville.

François du Moutier, principal des Grassins, a laissé à sa famille la maison de la Cour-des-Boeufs, qui attenait à son collège et que la communauté de provenance rendait solidaire avec l'hôtel d'Albret, pour le gens dû à l'abbaye de Sainte-Geneviève.

La marquise de Jussac en était propriétaire quand sonnait la dernière heure de Louis XIV. Lejeune, officier du roi, jouissait des mêmes droits, de 1732 à 1740. Puis est venu le docteur en Sorbonne Antoine de Sarcey de Suttières, que le cardinal de Gesvres, évêque et comte de Beauvais, a eu pour grand-vicaire. Son frère, Jacques Sarcey de la Combe, négociant, à Lyon, a été le légataire universel de ce prêtre, en vertu d'un testament reçu par Jarry, notaire à Paris, le 17 avril 1768, et l'exécution de ce testament a été consentie par les héritiers légitimes exhérédés, dont les principaux s'appelaient : J. B. de Suttières, écuyer, gentil homme-servant honoraire du roi ; Mlle Louise-Marie Sarcey, veuve d'Etienne Chanony, négociant à Lyon ; J. B. de. Suttières-Sarcey, ancien officier d'infanterie, et Mlles Antoinette et Jeanne Sarcey, filles majeures, ses soeurs ; Mme Clade Simon, veuve de Jean Sarcey l'aîné, négociant à Lyon, Benoît Sarcey, Melle Claudine Sarcey François et Philibert Sarcey, autorisés par Me Pierre Perrin, procureur ès-cours de Lyon, leur curateur à conseil nommé par sentence de la chambre de la sénéchaussée de la ville du 17 décembre dernier. Nomenclature d'autant plus intéressante qu'elle rappelle à Francisque Sarcey, notre confrère, des parents qui ne lui étaient pas encore aussi connus !

Il y eut place aussi dans le cul-de-sac de la Cour-des-Boeufs, mais plus au fond du sac, pour le séminaire de Saint-Hilaire, où des étudiants en théologie s'exerçaient aux cérémonies du culte. L'église Saint-Hilaire, qui avait une porte à l'entrée de la rue des Sept-Voies, était connue dès le XIIe siècle ; Philippe-le-Bel y avait annexé un petit hospice pour six pauvres femmes de bonne vie ; elle a été démolie en 1790.

François-Vincent Bazin, chapelain de Saint-Marcel, supérieur de la communauté de Saint-Hilaire, avait acheté la cour d'Albret, en 1718, de la présidente Rouillé, née Bitault, demeurant au couvent de Bon-Secours, rue de Charonne, et de sa fille mineure. Les six corps de logis que concernait principalement cette mutation permettent de croire que tout ce qu'on appelait encore l'hôtel d'Albret y passait. Néanmoins cela pouvait n'être que l'ancienne Ville-de-Barcelone. Un titre authentique nous dit bien que la cour d'Albret, qui avait appartenu à François Brisson, en la censive, justice, police, voirie, terre et seigneurie de l'abbaye, s'adjugeait en 1686 à Pierre Rouillé de Marbeuf, conseiller du roi, lieutenant général des eaux et fôrets, auquel nous savons de bonne part que Rouillé, président au grand-conseil, succéda. Malheureusement un autre document donne pour tenants à la cour d'Albret également une maison aux Brassins par-ci, une maison au président Rouillé par-là.

Collège de Reims. – Il y avait déjà près de cinq siècles que la rue des Sept-Voies avait sept débouchés sur ce versant de la montagne, heptacorde vibrant au grand air, quand, sous le règne de Charles VI, le testament de Guy de Roye, archevêque de Reims, fut ouvert : le défunt enjoignait à ses héritiers d'établir à Paris un collège de Reims et de Réthel. L'hôtel de Bourgogne, situé au-dessus de l’église Saint-Hilaire, fut acquis, en 1412 à cet effet pour une société d'écoliers, et les premiers bénéficiaires de ladite fondation champenoise avaient l'honneur d'être sous la conduite de Gerson. Né à Réthel, diocèse de Reims, cet auteur présumé de l'Imitation de Jésus-Christ avait fait ses études au collège de Navarre ; comme curé de Saint-Jean-en-Grève, il s'était élevé en chaire contre la doctrine de Petit, théologien, qui avait essayé de justifier le meurtre du duc d'Orléans, assassiné à la porte Barbette. L'influence de Gerson dans l'université de Paris était déjà considérable, avant qu'il y eût succédé, comme chancelier, à son ami le grand-maître Pierre d'Ailly.

Voulez-vous voir la porte principale de cet ancien collège, dont la façade sur la rue des Sept-Voies a été entièrement refaite en 1745 ? Elle répond au chiffre 46. La somme de 72,000 livres était énorme sous Louis XV, et surtout au pays latin ; on se demandait donc dans quelle caisse puisait, à pleines mains, le docteur en théologie François Copette, à la fois principal, procureur et chapelain, pour appliquer aussi forte dépense à une reconstruction partielle. Il ne suffisait pas à maître Copette, pour la défrayer, d'économiser deux offices ; il allait jusqu'à ramener à pareille unité les bourses fondées à trois reprises dans la maison qu'on réparait : mieux valait, après tout, subventionner quelque temps des maçons que des écoliers, s'il fallait retenir ceux-ci sous un toit qui se refusait à les couvrir, entre des murs qui commençaient eux-mêmes à faire l'école buissonnière. Aussi bien l'archevêque de Reims, collateur aux bourses, avait consenti à sauvegarder l'avenir de l'institution aux dépens du présent.

Mais avant que ce prélat ait à sacrer un nouveau roi, les petits collèges trop endettés doivent être réunis à Louis-le-Grand. Il s'assemble donc un conseil, par ordre du parlement de Paris, pour préluder par une enquête à la réduction et à la centralisation des bourses de tant de fondations pédagogiques. Or le recteur, les anciens recteurs et les principaux, qui composent ledit conseil, veulent au moins qu'on leur présente, qu'on leur fasse connaître à fond l'unique élève, rares avis, défrayé par le collège dont toutes les autres bourses sont en souffrance. Comparaît donc un jeune clerc tonsuré, arrivé par le coche la veille de la convocation, et il se nomme Laurent Modaine. Quand il aura été examiné par des régents, ce rhétoricien de province ne sera reçu, à Paris, qu'élève de troisième au collège de Lisieux. Il reste toutefois dix autres étudiants, tant en théologie et en philosophie qu'en médecine, en physique et en droit, payant loyer de leur chambre au collège de Reims, et ils ne sont pas tous obligés d'en sortir pour suivre le cours objet de leurs études.

Les professeurs de droit ont, en effet, pris à bail la plus grande classe de la maison, afin d'y donner des leçons, et d'autres élèves, dans une autre salle, profitent des leçons de maître Tranchant du Tret, bachelier en théologie, qui vise à entrer en Sorbonne ; la chapelle elle-même sert de classe à un maître de philosophie. Enfin l'instituteur Dubois, locataire d'une bonne portion des bâtiments, conduit deux fois par jour ses trente-cinq pensionnaires, comme élèves externes, au collège de Beauvais. Le principal de Reims, après avoir édifié ces messieurs sur l'état de l'intérieur, rend un compte non moins fidèle du revenu de 11 maisons formant le pourtour du collège, 6 rue de Reims et rue Chartière, 3 sur la rue des Sept-Voies ; sa place pourtant ne lui rapporte en tout que 1,374 livres 10 sous, sur lesquels 260 livres sont retenues pour son propre logement.

Le conseil, au bas du mémoire que lui a présenté Copette, écrit : « L'état de ce collège fournit une preuve bien sensible et bien convaincante de la nécessité de la réunion. » La grande institution Sainte-Barbe, en notre siècle, a établi les mathématiciens qu'elle prépare aux examens des écoles du gouvernement, dans la plus grande partie des bâtiments qu'avait occupés Reims, mis en vente par l'État les 8 messidor an IV, 2 mai et 8 août 1807. L'ancien collège Sainte-Barbe a été pour nous le sujet de recherches particulières (Histoire de l'ancienne Sainte-Barbe et du collège Bottin. In-8, 1858.)



 

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