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INSTITUTION NATIONALE DES SOURDS-MUETS
(D'après Paris,
450 dessins inédits d'après nature,
paru en 1890)
C'est bien à l'abbé de l'Épée, ce bienfaiteur de l'humanité, que les sourds-muets doivent non seulement le langage des signes qui remplace pour eux l'usage de la parole, mais aussi l'institution nationale où les jeunes sourds-muets reçoivent
En 1785, l'école des Sourds-Muets, établie jusque-là rue des Moulins à la butte Saint-Roch, reçut une subvention annuelle de 3,400 livres. L'abbé de l'Épée mourut le 23 décembre 1789, à l'âge de soixante-dix-sept ans. Son oraison funèbre fut prononcée le 23 janvier 1790 par l'abbé Fauchet, prédicateur ordinaire du roi. Le 21 juillet de l'année suivante, l'Assemblée nationale affecta une somme annuelle de 12,700 livres à l'école des Sourds-Muets, qui, du couvent des Célestins, où l'avait fait établir la reine Marie-Antoinette, fut transférée peu de temps après dans les bâtiments de l'ancien séminaire de Saint-Magloire, rue du Faubourg-Saint-Jacques. Ce séminaire avait été établi et confié aux Oratoriens par le cardinal-archevêque de Paris, en juillet 1618, en remplacement des religieux de Saint-Magloire, qui eux-mêmes en avaient pris possession par suite d'un échange avec le domaine royal, devenu propriétaire du terrain et des bâtiments. Ceux-ci avaient été construits au XIIe siècle par les membres d'une congrégation hospitalière dont la maison mère était le grand hôpital de Saint-Jacques du Haut-Pas, au diocèse de Lucques, en Italie. Leur chapelle du faubourg Saint-Jacques s'édifia sous ce vocable, qui passa ensuite à l'église voisine. Les bâtiments de l'école des Sourds-Muets ont été transformés par l'architecte M. Peyre, en 1823, tels qu'on les voit aujourd'hui. Elle passe pour le modèle achevé
De la rue Saint-Jacques, on aperçoit au centre de la cour d'honneur, dominant tout le voisinage et les bâtiments les plus élevés, la cime arrondie et verdoyante d'un orme, dont le tronc, qui mesure cinq mètres de circonférence à sa base, s'élance droit comme une colonne triomphale à cinquante mètres au-dessus du sol. On croit que cet orme gigantesque est le dernier survivant des arbres de ce genre plantés par ordre de Sully, vers l'année 1605. Il serait donc âgé de près de trois siècles, et il les porte sans faiblir. Presque en face la grille des Sourds-Muets s'ouvre la rue des Ursulines, percée au commencement du siècle à travers les bâtiments et les jardins du couvent de ce nom ; un peu plus loin et du même côté, on rencontre la rue des Feuillantines et le souvenir d'un autre couvent, fondé en 1622, avec l'appui de la reine Anne, dont le nom reparaît pour ainsi dire sur toutes les pierres de ce faubourg lointain qu'elle chérissait. La Révolution supprima le couvent et démolit l'église. Une partie des bâtiments et du jardin furent vendus ou cédés. On en reconnaît encore les restes du côté nord, séparés de la masse par la voie publique, au n° 10 de la rue des Feuillantines et au n° 12, occupé par un établissement de bains. Quelques bouquets d'arbres subsistent, qui firent partie de ce jardin des Feuillantines où Victor Hugo passa les plus heureuses années de son enfance et qu'ont immortalisé quelques vers des Orientales. La rue Saint-Jacques se restreint encore entre deux rangs de vieilles constructions ; celles du côté droit formant le revers de la rue d'Enfer, qui la sépare du boulevard Saint-Michel ; une partie d'entre elles et certainement le n° 282 ont dépendu du couvent des Carmélites ; celle-ci est occupée aujourd'hui par une sorte de ferme ou vacherie, qui débite du lait chaud et des œufs frais. Elle avait dès le siècle dernier cette destination, à l'enseigne de la Herse. Du côté gauche, des portes monumentales donnent accès au n° 269, occupé par une
C'est l'ancien couvent des Bénédictins anglais, fondé en 1674, et où l'on voit un petit monument moderne à la mémoire du roi d'Angleterre Jacques II. C'est là qu'avant la Révolution on conservait en dépôt le corps de ce-monarque, mort à Saint-Germain en Laye le 16 septembre 1701, et de Louise-Marie Stuart, sa fille, morte au même lieu en 1727. La vacherie du n° 282 est séparée du 284 par l'impasse des Carmélites, au fond duquel se voient l'ancienne porte et quelques restes des bâtiments de cette célèbre communauté, dont l'emplacement est morcelé par la rue du Val-de-Grâce, ouverte en 1797 entre la rue Saint-Jacques et la rue d'Enfer. C'était sous la domination romaine un vaste champ, nommé le champ des sépultures, et qui s'étendait au delà du jardin du Luxembourg. Catherine d'Orléans, duchesse de Longueville, y fonda en 1604 un couvent qui ne fut habité d'abord que par six religieuses, envoyées à la duchesse par le général des Carmes d'Espagne. C'est là que Louise-Françoise de La Baume Le Blanc, duchesse de La Vallière, vint en 1676 échanger ces titres somptueux contre l'humble nom de sœur Louise de la Miséricorde, et qu'elle mourut en 1710, après avoir expié ses péchés par les pénitences les plus dures. Entre la rue du Val-de-Grâce et le boulevard
Saint-Michel, la rue d'Enfer nous présente au n° 25 le couvent
des Carmélites, communiquant avec la rue Saint-Jacques, et au n° 19
l'école Lavoisier, l'une des écoles primaires supérieures
de la ville de Paris, mitoyenne avec les jardins de l'Institution
nationale des Sourds et Muets. Dans le mur de cet établissement
longeant la rue d'Enfer, est encastrée l'inscription suivante, presque à l'angle
de la rue de l'Abbé-de-l'Épée : « Regard
des eaux d'Arcueil, à l'usage de l'Institution nationale des Sourds
et Muets ; réédifié l'année 1846. »
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