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![]() LE VAL-DE-GRÂCE
(D'après Paris,
450 dessins inédits d'après nature,
paru en 1890)
Adroite de cette rue du Val-de-Grâce, d'où l'on aperçoit à l'ouest les ombrages du Luxembourg, l'œil embrasse l'ensemble du superbe monument qu'Anne d'Autriche fonda l'an 1641, en action de grâces de la naissance du Dauphin, qui fut Louis XIV, après vingt-deux ans de stérilité. Le jeune roi, âgé seulement de sept ans, en posa la première pierre le 1er avril 1645. Mansard, architecte de la couronne, avait dressé les plans et commencé la construction, qui rencontra de sérieuses difficultés, car l'église s'élève précisément sur les Catacombes, à l'endroit où elles comportent trois étages de carrières superposées. II fallut creuser des puits assez profonds pour atteindre la roche solide, et soutenir le nouvel édifice par de puissants massifs de maçonnerie. Les murailles commençaient à peine à sortir de terre lorsque la direction des travaux fut retirée à Mansard et confiée à Jacques Le Mercier, et finalement transmise à Pierre Le Muet, qui eut la gloire de terminer l'église, avec la collaboration de deux autres architectes : Gabriel Le Duc et Duval. La façade du Val-de-Grâce, comme celle de la Sorbonne t, est formée de deux ordres corinthiens superposés ; le rez-de-chaussée, percé d'une porte encadrée de colonnes, est surmonté d'un fronton inférieur qui manque à la Sorbonne, et au-dessous duquel on lit cette inscription latine, composée par Quinet, intendant des inscriptions des édifices royaux : JESU NASCENTI VIRGINIQUE MATRI. Le premier étage en retrait sur le rez-de-chaussée, s'encadre de quatre colonnes à ouverture centrale, et se couronne d'un second fronton où les armes de France sont aujourd'hui remplacées par une horloge. Deux élégants tourillons accompâgnent le dôme, accosté de pilastres, flanqué de quatre campaniles et couronné par une lanterne pyramidale, toute dorée et surmontée d'une croix latine, également dorée. L'intérieur comporte une nef unique, dont la coupole est soutenue par quatre grands arcs-doubleaux et quatre pendentifs, sculptés, ainsi que la voûte de la nef et les arcs latéraux, par Michel Auguier. Autour de la coupole, Pierre Mignard a peint une vaste fresque représentant le séjour des bienheureux, divisée en plusieurs hiérarchies. Cet admirable ouvrage, dont Molière célèbre l'achèvement en 1668 par un poème intitulé la Gloire du Val-de-Grâce, est certainement le chef-d'œuvre de Mignard et peut-être le plus important monument de peinture murale que possède Paris. La mosaïque du pavé en marbres de couleur attire encore l'attention, malgré son état de délabrement. Le maître-autel, reproduction de celui de Saint-Pierre de Rome, avait été détruit en 1793 ; l'architecte Ruprich Robert l'a reconstruit par ordre de l'empereur Napoléon III, et il a été consacré le 28 .juillet 1872. Le baldaquin de bronze, soutenu par des colonnes torses en marbre de Brabançon, est demeuré intact. A l'extérieur de l'église, les chérubins, les vases qui entourent le dôme et les groupes placés sur la chapelle du saint Sacrement sont du sculpteur Philippe Ruyster. Les peintures de cette chapelle, au-dessus de la grille, sont de Philippe de Champaigne et de son neveu Jean-Baptiste. Le dôme a été reconstruit en fermes de fer à la date de 1864 et 1865, à raison du mauvais état de sa charpente primitive. Fermée en 1790, l'église du Val-de-Grâce servit de magasin pendant la République et l'Empire ; elle a été rendue au culte en 1826. Les cœurs des princes et princesses de la famille royale furent successivement déposés dans les diverses chapelles de l'église ; le premier fut celui d'Anne-Élisabeth, la première fille de Louis XIV, morte en bas âge, le dernier celui de Louis, duc de Bourgogne, le 27 mars 1.761. Ces cœurs furent jetés au vent en 1793, mais non pas les reliquaires de vermeil qui les protégeaient. Un seul fut sauvé, c'était le cœur du premier dauphin fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette, qui fut rendu à la famille royale et porté à Saint-Denis en 1817. Cependant, deux cœurs sont aujourd'hui déposés dans l'ancien caveau : celui d'une Anglaise, nommée Mary Damby, sans qu'on sache qui elle était ; et celui de Larrey, l'illustre chirurgien de la Grande Armée, dont la statue en bronze, par David d'Angers, orne la cour du Val-de-Grâce. A la droite de l'église, de vastes bâtiments renferment l'hôpital militaire du Val-de-Grâce et l'École de médecine Profond, qui existait depuis et de pharmacie militaires. Ce sont les bâtiments de l'abbaye que la reine Arme avait fait construire pour y loger les religieuses du monastère du Val-Profond, qui existait depuis le XIIIe siècle à Bièvre-le-Châtel, près Paris. Les salles, les galeries, les chambres et les vastes escaliers du monastère subsistent encore, appropriés à leur nouvelle destination. Le premier établissement de l'hôpital militaire date d'un décret du 31 juillet 1793. Cet établissement doit une salubrité particulière aux vastes jardins de l'ancien couvent, qui assurent un air pur et sans cesse renouvelé aux malades et aux blessés militaires. L'hôpital contient 700 lits répartis sur une surface de 9,700 mètres carrés, entourés de 56,480 mètres non bâtis, en cours ou en jardins. Les salles pour les soldats et sous-officiers malades sont au nombre de 19 ; elles renferment 649 lits; les 45 autres lits sont partagés en chambres et cabinets pour les officiers blessés ou fiévreux. Le service médical et pharmaceutique est fait par les professeurs et agrégés de l'École de médecine et de pharmacie militaires. Les soins des malades sont assurés par 22 sœurs de Saint-Vincent de Paul, dont la supérieure a reçu la croix de la Légion d'honneur des mains du président Carnot, et par 150 soldats employés comme infirmiers. L'École de médecine et de pharmacie militaires, à laquelle on accède par la porte placée à droite en entrant dans la cour d'honneur du Val-de-Grâce, a été instituée par un décret du prince-président de la République du 9 août i85o, complété par des décrets de 1852, 1856, 1872 et 1881. Elle pourvoit au recrutement des officiers du corps de santé militaire. La région qui entoure le Val-de-Grâce au nord et à l'est et qui forme un quadrilatère irrégulier, entre la rue Saint-Jacques, le boulevard de Port-Royal, l'avenue des Gobelins et les abords du Panthéon, renferme des établissements importants d'instruction. publique. A la rue d'Ulm, entre la rue des Ursulines et celle des Feuillantines, dêvenue rue Claude-Bernard, au delà de la rue Gay-Lussac, s'élève un bâtiment environné de verdure. C'est l'École normale supérieure, construite en vertu d'une loi de 1841, sur l'ancien clos Saint-Joseph, par l'architecte Gisors, et inaugurée le 1 avril 1847. Placée sous l'autorité directe du ministre destruction publique, l'École normale supérieure est destinée à former des professeurs dans les lettres et les sciences pour l'enseignement secondaire et supérieur dans les établissements de l'État. Les élèves doivent être pourvus du grade de bachelier et prendre l'engagement de se vouer pendant dix ans à l'instruction publique. Le régime de l'École est l'internat gratuit ; la durée des cours est de trois ans. Les-élèves sortants sont nommés professeurs dans les lycées de l'État. Un grand nombre d'entre eux, abandonnant le professorat, en vertu de congés provisoires ou définitifs, ont fourni une brillante carrière dans la littérature, la politique, le roman et la critique dramatique. L'École normale supérieure ne saurait assimiler l'élite des bacheliers ès lettres et ès sciences à des écoliers ordinaires ; aussi l'instruction ne leur est-elle pas donnée dans des classes, mais dans des ü conférences s, et les maîtres de conférences, faisant fonction de professeurs, sont eux-mêmes choisis parmi les hommes les plus distingués. L'École normale de la rue d'Ulm renferme une fort belle bibliothèque, où l'on a réuni une partie des livres de Cuvier. Les jardins du Val-de-Grâce sont bordés, à gauche du débouché de là rue Saint-Jacques, par le boulevard de Port-Royal, qui commence au carrefour de l'Observatoire, en prolongement du boulevard du Mont-Parnasse, et va se réunir au boulevard Arago, devant l'église Saint-Médard, en bas de la rue Mouffetard. Poursuivons d'abord la rue Saint-Jacques, qui devient faubourg du même nom de l'autre côté du boulevard de Port-Royal. Le premier édifice qui se présente en entrant dans le faubourg Saint-Jacques, avec façade sur le boulevard, est précisément l'ancienne abbaye de Port-Royal, devenue depuis la Révolution un hôpital spécial pour les femmes en couches. Le peuple l'appelait la Bourbe, nom d'une ancienne rue qui la bordait, et que le boulevard de Port-Royal a absorbée. Sous l'Empire, c'était l'hospice de la Maternité. On la nomme aujourd'hui Maison d'accouchement ; elle contient 300 lits ; la mortalité moyenne y est d'un décès sur 9,21. Les bâtiments principaux, couverts en tuiles, et la chapelle, couverte en ardoise, qui se laissent voir du boulevard .au-dessus des hautes murailles de l'enceinte, ont été bâtis de 1646 à 1648, par l'architecte Le Pautre, pour la mère Angélique Arnauld, qui y transféra le monastère de Port-Royal des Champs, dont elle était l'abbesse, et y établit, avec la permission du pape, l'adoration perpétuelle du saint sacrement. Elle renfermait alors deux tableaux de Philippe de Champaigne, qui se trouvent main-tenant au musée du Louvre : la Guérison miraculeuse de sa fille et la Cène de N.-S. Jésus-Christ. L'autre encoignure du faubourg Saint-Jacques est occupée par un autre hôpital, officiellement dénommé hôpital du Midi. 11 contient 336 lits et la mortalité moyenne y est d'un décès sur 233. 11 a été établi le 12 mars 1792 dans l'ancien couvent des Capucins. Du même côté s'ouvre, au n° 43 de la rue du Faubourg-Saint-Jacques, la grille de l'hospice Cochin, qui renferme 197 lits, et dont la mortalité moyenne est de 1 sur 9,49. Cet hôpital fut fondé en 1782 par Jean-Denis Cochin, curé de Saint-Jacques du Haut-Pas. Ce vénérable et courageux bienfaiteur des pauvres, qui avait cent fois risqué sa vie pour ses paroissiens pendant la contagion de 1765, n'avait donné d'autre nom à son œuvre charitable que celui d'hospice de la paroisse Saint-Jacques du Haut-Pas. La reconnaissance publique lui décerna en 1784, un an après la mort de l'abbé Cochin, le nom de son fondateur, et il l'a gardé, quoique la Révolution l'eût quel-que temps affublé du nom d'hospice Jacques. Le buste en marbre de l'abbé Cochin se voit dans la salle principale de la maison. La rue du Faubourg-Saint-Jacques, traversant le boulevard Arago, qui vient de la place Denfert-Rochereau, aboutit au boulevard Saint-Jacques, ancien boulevard extérieur, par une place demi-circulaire, que fermait l'ancienne barrière Saint-Jacques. Pendant vingt ans, de 1832 à 1851, c'est sur la place Saint-Jacques que se dressa l'échafaud pour l'exécution des condamnations capitales. Les cabarets qui l'entouraient étaient assiégés par la foule, et les fenêtres se louaient fort cher, comme autant de balcons où l'on pouvait, après souper, finir la nuit par le hideux spectacle de la guillotine. Le boulevard Saint-Jacques et la rue de la Santé nous ramèneront au boulevard de Port-Royal, en face des jardins du Val-de-Grâce. Sur la gauche de ce parcours, courent les hautes murailles d'un établissement pénitentiaire de construction récente. La maison dite de la Santé occupe, entre la rue de ce nom, le boulevard Arago et la rue du Faubourg-Saint-Jacques, un vaste triangle d'une superficie de 26,000 mètres, qu'on appelait autrefois l'enclos de la Charbonnerie. C'est la maison d'arrêt et de correction cellulaire qui remplace l'ancienne prison des Madelonnettes du Temple, et à laquelle est adjointe l'infirmerie centrale des prisons de la Seine. Chacun de ces établissements a son personnel distinct. La forme générale de la prison consiste en quatre corps de logis réunis au centre de manière à former une sorte de croix.'Elle a été construite en 1865 par j'architecte Vaudremer et a coûté 6 millions de francs. Elle reçoit annuellement environ 12,ooo détenus, à peu près le neuvième de la population totale des prisons de Paris. Les jardins du Val-de-Grâce s'étendent au midi, le long du boulevard du Port-Royal, jusqu'à l'ancienne rue des Charbonniers, maintenant rue Berthollet, ayant pour vis-à-vis du côté du nord deux importantes casernes : celle des sapeurs-pompiers et celle des troupes de ligne, dite caserne de Lourcine. Au droit de celle-ci, la rue Berthollet remonte les dernières pentes de la montagne Sainte-Geneviève, traverse une rue singulièrement étroite, appelée rue des Lyonnais, et accède enfin à la rue de l'Arbalète, laquelle conduit à la rue Mouffetard. Sur le côté impair, une suite de bâtiments, dont la vétusté est mal déguisée par des réparations récentes, renferment, du n° 9 au n° 21, un établissement d'instruction publique, l'Institut national agronomique, destiné à l'étude et à l'enseignement des sciences dans leurs rapports avec l'agriculture. Installée d'abord au Conservatoire des arts et métiers, rue Saint-Martin, elle remplace, à la rue de l'Arbalète, l'École supérieure de pharmacie, transportée dans des bâtiments neufs, avenue de l'Observatoire, à l'extrémité sud du jardin du Luxembourg. L'École supérieure de pharmacie succédait elle-même, rue de l'Arbalète, au jardin des Apothicaires, acheté et planté en 1596 par un membre de cette utile corporation, nommé Nicolas Houel, qui y adjoignit un orphelinat dont les élèves devaient être voués à l'apothicairerie. École de pharmacie dès 1627, Collège de pharmacie en 1777, la fondation de Nicolas Houel devint l'École de pharmacie en 1804. Le jardin de l'École ayant été coupé et détruit par le prolongement de la rue des Feuillantines sous le nom de rue Claude-Bernard, le transfèrement de l'École supérieure fut décidé. Où il n'y avait plus de place pour la botanique médicinale, on a trouvé qu'il en restait assez pour l'agriculture. Il est vrai qu'il s'agit surtout d'expériences chimiques et de recherches de- laboratoire, étant bien entendu que, dans cette étroite bande de terrain resserrée au nord par l'ornière raboteuse qui s'appelle la rue de l'Arbalète, et en contre-bas, par les hautes maisons de la rue Claude-Bernard, on ne saurait faire, à défaut de chimie, que de l'agriculture en chambre. A deux pas de là la rué de l'Arbalète s'embranche sur
la rue Mouffetard, qui descend du sommet de la montagne Sainte-Geneviève,
en prolongement de la rue de l'École-Polytechnique et de la rue Descartes,
pour aboutir à un vaste carrefour formé par l'intersection des
larges voies qui ont transformé. cette région de Paris, la rue
Claude-Bernard, le boulevard de Port-Royal, le boulevard Arago, l'avenue des
Gobelins et la rue Monge. Au coin de celle-ci et ombragée par un square,
l'église Saint-Médard dresse sa tour carrée à usage
de clocher et sa flèche d'ardoise. Le bourg Saint-Médard, qui
lui devait son nom, formait de ce côté le trait d'union entre
le faubourg Saint-Marcel et la ville, dont ils étaient demeurés
distincts jusqu'au règne de Louis XV.
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