Rues et places de Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de l'histoire des rues et places, quartiers de Paris : comment ils ont évolué, comment ils sont devenus le siège d'activités particulières. Pour mieux connaître le passé des rues et places, quartiers de Paris dont un grand nombre existe encore.
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RUE SAUVAL
IIIème arrondissement de Paris
(D'après Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, par Charles Lefeuve, paru en 1875)

Notice écrite en 1864. Le nom du magistrat Sauval, auteur des Recherches sur les Antiquités de Paris, n'était pas encore donné à la rue des Vieilles-Etuves-Saint-Honoré, qui n'avait pas encore englobé la pétite rue Devarenne entre la rue des Deux-Ecus et la Halle-au-Blé. Précédemment rue des Vieilles Etuves Saint-Honoré, rue des Vieilles-Etuves-Saint-Martin, antérieurement rue des Etuves ou rue des Estuves et, plus anciennement, rue du Pressoir du Bret. Ce tronçon existait en 1300. Egalement pour une partie, rue Devarenne ou rue de Varennes ; le côté pair de cette partie, situé dans le secteur des Halles, fut déclassé par l'arr. du 17 août 1973, puis supprimé, ramenant la largeur de la voie de 29 m à 6 m. Origine du nom : Henri Sauval (1620-1670), avocat au Parlement, historien de Paris.

On Dieu tient le cœur des rois en sa main de clémence ;
Soit chrétien, soit païen, leur pouvoir vient d'en haut,
Et nul mortel ne peut (c'est un faire le faut),
Dispenser leurs sujets du joug d'obéissance.

On lisait ce pauvre quatrain, rue des Vieilles-Étuves-Saint-Martin, sur une maison bâtie par un des architectes de Henri IV. Il va sans dire que la Révolution a gratté pareille inscription.

En même temps, comme nul ne l'ignore, on a supprimé les maîtrises. Dans celle des barbiers-perruquiers étaient incorporés les baigneurs-étuvistes. Sauval remarquait, dès l'année 1660, que les étuves devenaient rares à Paris, et il rappelait qu'à la fin du siècle précédent on ne pouvait faire un pas sans en rencontrer un établissement. Néanmoins, du vivant de Sauval, des maisons de bains, assez nombreuses faisaient encore concurrence aux maisons borgnes comme, il y en a une au n° 14 de ladite rue, et cela contrairement à une quantité d'ordonnances de police répétant une défense, qui était déjà faite, du temps d'Etienne Boileau, aux baigneurs du XIIIe siècle, en ces termes : « Que nuls ne soustiengne en leurs mesons bordiaux ne de jour ne de nuict. »

A cette époque reculée les étuvistes parisiens n'étaient qu'au nombre de 26, et celui de la rue des Étuves-Saint-Martin s'appelait Richard ; celui de la rue des Etuves-Saint-Honoré, Guillaume. Les voisins de ce dentier étaient : Amiot le lombart, Guille de Launoy, taunier, Loren, François, boucher, Zehanne de tondis, qui taille or, et devant sa porte il coulait un ruisseau dit le rû des Etuves. Il en coûtait moitié moins cher pour s'estuver chez Guillaume et chez Richard que pour s'y baingnier. De bon matin leurs crieurs réveillaient les habitants de leur quartier respectif, en annonçant que l'eau était chaude. Aussi Guillaume de Villeneuve chroniquait-il ainsi dans ses Crieries de Paris :

Oiez c'ou crie au point du jor :
Seignor, qu'or vous alez baingnier
Et Estuver sans delacer ;
Li-bains sont chaut, c'est sans mentir !

Un des prédécesseurs de Richard avait coulé des bains pour la reine Blanche ; un de ses successeurs fut Geoffroi, à l'image du Lion-d'argent, et à cause de lui, sous Jean-le-Bon et sous Charles V, on disait rue Geoffroi-les-Bains. La maison où cette dynastie de baigneurs devait, tenant estuves à femmes, ne chauffer icelles pour hommes, et dans laquelle on se baignait encore en 1578, est maintenant le n° 4.

L'autre rue des Vieilles-Étuves prenait transitoirement le nom de Jacques-de-Verneuil, sous Philippe-le-Bel ; elle rejoignait alors la rue de Nesle, aujourd'hui d'Orléans, plus haut que celle des Deux-Écus, connue comme rue Traversaume, et elle aboutissait à un hôtel, que dis-je ! à un palais. Là, en effet, Philippe-le-Bel venait après Louis IX, et avant Charles de Valois, Jean de Luxembourg, roi de Bohême, Charles V, Amédée VI comte de Savoie, Louis XII, étant duc d'Orléans, Catherine de Médicis, Catherine de Bourbon, Charles de Soissons, le prince de Carignan, la banque de Law, dont le dernier marché aux actions fut en cet hôtel, et enfin la Halle-au-Blé.

L'agrandissement de l'hôtel de Soissons pour Catherine de Médicis raccourcissait, dans ces parages, en 1577, et, la rue d'Orléans et celle des Vieilles-Étuves, où le n° 16, dit-on, appartint à la même reine. 117aison dont le propriétaire, sous Louis XVI, signait : Dupont. A cette époque le chevalier Desforges disposait des deux immeubles situés en face. De toute façon un hôtel garni de Carignan avait été porté en 1769 à l'avoir de cette rue des Vieilles-Etuves.

N'y cherchez plus l'estaminet où naguère se réunissaient, pendant la quinzaine de Pâques, tous les comédiens et comédiennes de France sans engagement : le Roman comique a quitté la brasserie qu'on y voit encore, pour un café de la rue des Marais-Saint-Martin et pour son allée favorite au jardin du Palais-Royal.

En la même rue avait résidé, à l'enseigne, du Barillet, Ogier de Gombaud, l'un des poètes fêtés à l'hôtel Rambouillet, qui fit la tragédie des Danaïdes, et qui fut le premier à s'asseoir dans l'un des fauteuils de l'Académie-française. Le sieur Joubert y vendait des olives et des anchois, en ce temp : là, au Soulier-d'Or. Quant aux bains, ils étaient déjà de l'histoire ancienne pour ces deux habitants.

A plus forte raison Jaillot n'en parla-t-il que rétrospectivement, en les mettant au nombre de ceux où le maître étuvisté n'avait que faire d'être barbier, s'il se conformait aux mesures qui les ouvraient exclusivement au sexe qu'il était autorisé à y recevoir. Leur établissement datait d'avant l'enclavement de la rue dans l'enceinte de Philippe-Auguste ? N'en pourrait-on pas dire presque autant de l'escalier à vis qui tourne encore dans le fond du n° 6, et de la petite niche à madone du 14 ?

 


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