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RUE DU REGARD
VIe
arrondissement de Paris
(Histoire de
Paris rue par rue, maison par maison, Charles Lefeuve, 1875)
Notice écrite en 1860. La rue depuis a été raccourcie, surtout du côté gauche, par le prolongement de la rue de Rennes, qui la prend en écharpe. . Commençant : rue du Cherche-midi, 37. Finissant : rue de Rennes, 116. Historique : elle a primitivement été dénommée chemin Herbu, puis chemin de la Fosse à l'Aumosnier dit Herbu (1529), rue de la Descente de Montargis (1646), rue des Carmes et rue du Regard (fin du XVIIe siècle). Origine du nom : n regard de fontaine était autrefois situé dans cette voie. Les carmes déchaussées que Marie de Médicis établit en l'année 1836 rue de Vaugirard, y furent tout de suite en communication, par une porte latérale, avec un chemin herbu dont la rue du Regard n'avait pas encore fait son lit. Les constructions manquaient alors du côté des numéros pairs ; mais le sol était divisé, et M. de Montrouge, propriétaire au coin de la rue du Cherche-Midi, était suivi par M. de Rochefort ; puis venait un lieu dit la Fosse-Lausmonier, à l'endroit où se trouvent de nos jours les bureaux de l'Ami de la Religion, dont les colonnes donnent au public la primeur de cette chronique ; une terre à l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés occupait l'autre, extrémité. Les carmes avaient, du côté opposé, un bien originel, qui s'était appelé la Planche, avec sortie vers le milieu du chemin ; au-dessus de cette ouverture s'élevaient déjà trois maisons, et les mêmes religieux possédaient le terrain d'encoignure venant après. Des fossés que la ville s'étai donnés par-là pour limites, faciles à reculer, n'eurent pas été plus tôt comblés que l'herbe du chemin, foulée aux pieds ou rasée, disparut première toilette que fait toute rue nouvelle ! Aussi bien le baptême de cet enfant de plus pour la carte de Paris ne traîna pas une véritable fontaine, dite le Regard, coulait déjà au point où la rue de Vaugirard tient à la rue Notre-Dame-des-Champs. Le chemin dégrossi enleva son nom à la fontaine, que les Carmes changèrent, par la vertu de leurs aromates, en une source d'eau de mélisse. Dans une ou deux des maisons précitées furent mis en nourrices des enfants confiés paf le roi aux soins de Mme de Maintenon, qui habitait alors la rue d'Enfer, et ils n'étaient pas tous au même endroit. Elle s'en allait à pied et en secret, dans les commencements, passer en revue, d'alvéole en alvéole, cet essaim de nourrissons qui grandissaient lentement emblème et gage de son crédit. Des trois premières constructions de la rue, une seule est venue jusqu'à nous ; les carmes n'en firent pas les frais d'établissement, mais elle fut en leur possession, et M. de la Guiche en disposait au commencement de la Révolution. Celui-ci eut pour acquéreur, en l'an XII, M. d'Aligre, qui revendit au bout de trois années à M. Devillas, un des fondateurs de l'entrepôt de Bercy. Cet ancien négociant était presque nonagénaire lorsqu'il établit dans sa demeure, en 1835, un hospice de 30 lits, qui porte encore son nom, mais que le prolongement de la rue de Rennes ne tardera pas à reporter ailleurs. A l'immeuble donné par M. Devillas s'est ajouté, de seconde main, l'ancien atelier de David, le statuaire, avec un jardinet. Contigu est l'ancien hôtel de la Guiche proprement dit, édifié en 1711, à la place d'une autre maison, pour la fille du marquis de Montataire et de Marie-Thérèse de Rabutin, qui venait d'épouser son neveu, Léon Madaillan de Lesparre, comte de Lassay. Quarante-trois ans se passèrent avant que le comte de la Guiche s'y installât il avait épousé, en 1740, Henriette de Bourbon, appelée Mme de Verneuil, fille naturelle légitimée du prince de Condé. Son fils, colonel du régiment de Bourbon, puis Mme Chastenay de Lanty, née La Guiche, eurent ensuite la propriété. Une école égyptienne y précéda, de notre temps, les dames de Saint-François-Régis. L'orphelinat voisin occupe lui-même un ci-devant petit hôtel de la Guiche. Darlons, secrétaire d'un autre Bourbon-Condé, s'était rendu adjudicataire d'une maison à porte cochère, qui avait appartenu à l'Hôtel-Dieu et qui séparait du jardin des carmes une maison au marquis de Cossé. Ces religieux commandèrent à Victor Dailly, après la mort de Louis XIV, quatre hôtels pour la rue du Regard. Le frère Jean-Pierre de l'immaculée Conception, prieur, et les frères Paul-du-Saint-Sacrement : 1° discret, Epiphane-de-Saint-Joseph, 2° discret, Laurent-de-Jésus, 3° discret, Magloire-de-l'Ascension, provincial, ainsi que les destinataires de ces habitations nouvelles, en approuvèrent à l'avance les dessins. La vicomtesse de Beaune occupa, la première, celui desdits hôtels qui passa après elle au prince de Robeck, grand d'Espagne, c'est-à-dire le n° 7. On y retrouve de beaux appartements et un agréable jardin, auquel s'arrête par discrétion l'éloge : Mme la marquise d'Hautefeuille rajeunit, et de plus d'un siècle, par sa gracieuse présence, cette maison, que son premier mari, le marquis de Bellune, tint du maréchal de Bellune. La famille de Chevet, le marchand de comestibles,
paye l'impôt foncier pour le 5, qui fut assez longtemps hôtel
de Croy. On y vit le prince de Croix, qui épousa la fille du prince
régnant de Salm-Rirchbourg, succédera son père, qui
ait combattu à Fontenoy. L'inaugurateur de leur hôtel avait
été M. de Rothenbourg, général prussien qui
avait servi dans les armées françaises son neveu avait hérité
de ses richesses, puis épousé la fille du marquis de Parabère.
Le ministre de l’intérieur ordonnait, le 17 fructidor an
IV, à l'architecte Signy d'établir le devis dès travaux
à faire dans les ci-devant hôtels de Croy, et de Robeck pour
y transporter le garde-meuble national de la place de la Concorde mais,
l'année subséquente vit abandonner ce projet. Le petit hôtel de Vérue, sortit aussi du crayon de Victor Bailly ; il avait pour aîné le grand hôtel, même nom, plus tard de Toulouse, aujourd’hui des Conseils de guerre, qui donne rue du Cherche-Midi. La comtesse de Vérue, célèbre par sa beauté, par son esprit, par ses soupers, par les curiosités que réunissait sa galerie, avait eu son mari tué à la bataille d'Hochstett. Elle avait francisé la cour d'Amédée II, duc de Savoie et puis roi de Sardaigne, mieux que n'y était parvenue l'influence légitime d'une nièce de Louis XIV. La cour galante dont Mme de Vérue demeurait la reine à Paris, n'appliquait-elle pas en détail à des intrigués d'un autre genre une politique encore plus versatile, mais moins tortueuse, moins dangereuse que celle qui tourmenta si fort le premier règne de la maison de Savoie ? Plutôt que d'abdiquer l'ombre du pouvoir de ses charmes, la comtesse aurait cessé de vivre avant l'année 1731, qui ne l'emporta ni trop tôt ni trop tard. Sa fille était princesse de Carignan. Ne se pourrait-il pas que le comte de Toulouse, fils de Mme de Montespan, fût venu vers la fin de sa vie habiter la rue du Regard, où son enfance avait été bercée ? Les dates ne disent pas non M. de Toulouse, marié secrètement avec Mlle de Noailles, veuve du marquis de Gondrin, a survécu de six années à la comtesse de Vérue. Mais un Toulouse-Lautrec, colonel du régiment de Condé, député aux États-Généraux, fut dit aussi comte de Toulouse. D'autre part, un des deux hôtels de la comtesse de Vérue était habité, sous Louis XVI, par le comte de Scarnasis, ambassadeur sarde. Le plus petit a dû aussi de la notoriété au Dr Récamier ce beau-frère de la femme illustre du même nom en avait fait l'acquisition en 1821, et sa famille s'y retrouve. Sur l'autre ligne de la rue, un hôtel Montréal était en tiers dans les beaux jours des hôtels de Croy et de Chalons. Nous croyons en revoir la haute porte, avec une demi-lune d'avant-cour, seulement les indigènes y soutiennent mordicus que ce furent uniquement les communs de l'hôtel d'en face.
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