Rues et places de Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de l'histoire des rues et places de Paris : comment elles ont évolué, comment elles sont devenues le siège d'activités particulières. Pour mieux connaître le passé des rues et places dont un grand nombre existe encore.
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PASSAGE BASFOUR ,
IIe arrondissement
de Paris
(D'après Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, paru en 1875)

Notice écrite en 1857. Le passage Basfour se retrouve entre la rue Saint-Denis et la nouvelle rue de Palestro ; mais le haut en a disparu depuis 1857. Le passage a miraculeusement survécu au boulevard Sébastopol ! Originedu nom : La rue aboutissait aux fours de la Plâtrière de la Croix Verte, devenue plus tard le cimetière de l'hôpital de la Trinité.

La révolution du 24 février 1848, qui s'était accomplie, pour ainsi dire, sans résistance, se tourna après coup, et en se ravisant comme par humilité, contre les gens qui l'avaient laissé faire. Ces excellents propriétaires, lorsqu'on les eut menacés dans tout ce qu'ils avaient de plus cher, la propriété, jurèrent, comme de juste, de laisser faire un autre 9 thermidor ; qui fut le 24 juin1848, et un 18 brumaire dont la seconde représentation eut lieu le 2 décembre 1851, avec le même succès que la première.

Bien des gens s'en prennent de plus belle à ceux qui signent les quittances de loyer, et qui, effectivement, après avoir brûlé bien des lampions involontaires pendant l'affreux cauchemar des sept vaches maigres, ne sont pas trop fâchés que le rêve des sept vaches grasses ait son tour. Mais il s'en faut de beaucoup que tout y soit rose. Les atteintes portées aux droits acquis ne restent jamais à court de prétextes quand sévit la guerre civile ; elles ont beau se parer ensuite du manteau de la légalité ; leur incessante multiplication est le signé le plus évident qu'on a encore un pied dans la Révolution. Les adversaires en armes de la propriété ont pansé leurs blessures, porté le deuil de leurs morts mais ils ont laissé derrière eux une invisible barricade, dont le feu roulant ne tue plus, mais exproprie pour cause d'utilité publique. Le bourgeois, ensorcelé par une indemnité, ne s'aperçoit même pas qu'il y va moins encore de sa maison que de la bourgeoisie. Celle ci ne devient-elle pas, en général une bohême d'un genre nouveau qui n'a plus de crédit qu'en raison de la hausse des fonds publics, dont elle porte la chaîne pieds et poings liés ? Que de victimes dans ce qu'on appelait les rangs de l'ordre.

Par malheur, disent les pessimistes, le droit de posséder n'est pas mort ; à peine s'il a changé de mains, et sa tyrannie pèse toujours. Il a fallu absolument que plusieurs de ces pauvres, pour changer d'opinion, s'enrichissent à la place de plusieurs déclassés. Les nouveaux propriétaires peuvent néanmoins trouver d'excellents modèles dans plus d'un ancien.

Par exemple, aucun parvenu de fraîche date n'est de composition plus facile avec ses locataires que M. Honoré, qui possède une immense maison habitée par la classe laborieuse dans le passage Basfour, du côté de la rue Grenétat. Jamais son père ou lui-même n'a fait vendre le mobilier d'un locataire, et jamais ils n'ont augmenté le prix de leurs loyers, qui en général est modeste. On a pourtant voulu brûler, en juin 1848, les bâtiments appartenant à M. Honoré ; soixante-dix fusils y avaient été laissés sur les carrés des escaliers par des insurgés, mis en fuite après avoir fait de la maison une véritable citadelle.

Quant à M. Honoré père, il avait essuyé l'ingratitude de ses voisins pendant la grande révolution. Le tabletier Defrance, un terroriste qui avait sa sœur tricoteuse, s'était souvent armé d'une pique, au bout de laquelle il aspirait à mettre la tête de son propriétaire. Une dénonciation en règle, fut donc lancée contre le citoyen Honoré et contre deux marchands, les citoyens Ginette et Nolin, qui soupiraient, comme lui, après la fin des sanglantes saturnales, et M. Honoré l'échappa belle, car les deux autres furent condamnés à mort.

La porte sur la rue Grenétat était à l'enseigne du Roi-David, depuis plus d'un siècle, lorsqu'une lingère, en 1814, quitta la place où est maintenant établi un peaussier. Nos pères ne connaissaient, au reste, qu'une impasse du nom de Basfour, comprise dans la censive du roi, et en 1714 cette ruelle sans chef n'avait qu'une maison et qu'une lanterne. La maison est le n° 4 ; il s'y révèle dans l'antre d'un charbonnier une ancienne chapelle de la Trinité, où l'on a dit la messe avant les représentations données dans ce couvent par les confrères de la Passion ; l'occupation locale avait cessé d'être monastique sans rien ôter de ses droits de propriété à l'hôpital dé la Trinité. La maison des Vieilles-Étuves donnait aussi sur le cul-de-sac, mais par-derrière, et la principale entrée en était rue Saint-Denis. Du côté le plus rapproché de la rue Saint-Martin commençait l'ancien cimetière de la Trinité, propriété de l'Hôtel-Dieu il englobait le carré qui, dans le passage, sert de jardin au café Marchetti. Il y a environ trente ans que les propriétaires du passage Saint-Denis et de l'impasse Basfour se sont entendus pour faire de l'un et de l'autre un seul passage.


 

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