Rues et places de Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de l'histoire des rues et places de Paris : comment elles ont évolué, comment elles sont devenues le siège d'activités particulières. Pour mieux connaître le passé des rues et places dont un grand nombre existe encore.
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RUES DES ROSIERS DES JUIFS (FERDINAND DUVAL)
ET DES ÉCOUFFES

IVe arrondissement de Paris
(Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, Charles Lefeuve, 1875)

Notice écrite en 1860. La rue des Ecouffes ne traversait pas encore celle du Roi-de-Sicile pour tomber dans la rue de Rivoli prolongée. Rue des Rosiers commençant : rue Malher, 131. Finissant : rue Vieille Du Temple, 40. Monuments classés : aux nos 8, 10, 14, 16 et 11 : restes de l'enceinte de Philippe-Auguste. Historique : précédemment rue des Rosiers et impasse Coquerelle. La rue des Rosiers, qui s'étendait entre la rue des Juifs (aujourd'hui rue Ferdinand Duval) et la rue Vieille Du Temple, était bâtie et portait déjà ce nom en 1230. L'ancienne impasse Coquerelle, qui était située dans le prolongement de la rue des Rosiers, s'étendait sur une longueur de 47 m à partir de la rue des Juifs. Cette impasse provenait d'une rue appelée primitivement rue de la Lamproie, puis Coquerée (1415) et Coquerrie (1540). Rue des Juifs (fernand Duval) ommençant : rue de Rivoli, 18. Finissant : rue des Rosiers, 7. Historique : précédemment, rue des Juifs et, antérieurement, rue des Rosiers (partie B). La partie A a absorbé le passage du Petit Saint-Antoine. La partie B paraît avoir existé dès le XIIIe siècle. Origine du nom : Emile Gustave Ferdinand Duval (1827-1896) ; préfet de la Seine et conseiller municipal.

Mlle d'Estat. – Chabenat de Bonneuil. – L'Abbé Robert. – Coquerel. – Lefèvre de Léseau. – Mailliée. – Philippe de Champagne. – Buache. – Le petit Baragueg-d'Hilliers.

Saint Louis a connu ces trois rues, qui n'en formaient encore que deux. La première faisait en ce temps-là retour d'équerre pour aboutir rue du Roi-de-Sicile ; la seconde s'en est détachée vers la fin du XVe siècle ; la troisième, qui est parallèle a la seconde, donne perpendiculairement dans la première.

Une des portes cintrées qu'on voit rue des Rosiers est au coin de la rue, des Ecouffes son écusson doit être veuf des armes d'un preux de la chevalerie. Mais, dans le siècle de la philosophie, du vin de Champagne et de la poudre, une jolie bourgeoise y a porté, des mouches, et elle n'en a pas moins fait son chemin, ou plutôt celui de son mari. Elle était fille de M. de Vaudet, avocat, et petite-nièce du curé de Saint-Eustache. Personne de mieux campé qu'elle sur les talons des femmes de qualité, bien qu'elle fût née dans la pénombre du Palais. On hésitait surtout à dire de cette charmante femme qu'elle était dans la robe, quand on la rencontrait au bal ou au spectacle elle en sortait si bien que jamais la rue des Rosier n'avait mieux justifié son nom.

Rien de plus frais que son visage, rien de mieux tourné que sa taille, et pourtant la jolie commère avait ses quatre ou cinq enfants ! Par bonheur, elle était déjà Mme d'Estat. Quand son mari passa lieutenant-colonel à la suite d'un régiment de cavalerie, grande rumeur parmi les capitaines, qui ne l'avaient eu que six mois pour égal. Mais, prenant leur parti en braves, les officiers victimes du passe-droit s'en adressèrent à eux-mêmes ce compliment de condoléance : – Quand on fait son chemin par l'épée, c'est plus lent que par le fourreau !

Un président au parlement, Chabenat, seigneur de Bonneuil, qui demeurait rue Richelieu, possédait un hôtel rue des Rosiers, 14. N'avons-nous pas des motifs personnels pour suivre avec, plaisir, dans le présent travail, les traces des Chabenat de Bonneuil, alliés aux Le Feuve de la Malmaison ? Celui-là était acquéreur de Briqueville, marquis de la Luzerne, maréchal de camp, dont la femme avait hérité du président Camus de Pontcarré, baron de Maflliers, son père. Un autre Camus de Pontcarré avait acheté de Gilbert des Voisins, avocat général, cette maison, que la comtesse de Choiseul-Plessis-Praslin tenait elle-même de son père, Le Charron seigneur de Plaisance, adjudicataire en 1611 sur Pierre l'Escalopier.

En remontant beaucoup plus haut encore, nous trouvons qu'une donation de 6 sols, de rente a été faite sur cette propriété, en 1237, aux frères de Sainte-Catherine-du-Val-des-Écoliers par le nommé Le Charpentier. Du même prieuré de Sainte-Catherine s'avouait titulaire pour le cens, en 1663, Gilles Robert, docteur de la faculté de théologie de Paris, au nom de son père, Nicolas Robert, sieur de Lay, en raison d'une autre propriété, qui était grande, rue des Rosiers, en vue de celle des Juifs, avec une place par-derrière, le tout acquis en 1631 de J. B. Scarron, sieur de Saincton.

Une impasse Coquerel, qui avait été rue deux siècles et demi auparavant, a été réouverte en 1848, sur un arrêté pris par le ministre de l'intérieur Ledru-Rollin, et ajoutée à la rue des Rosiers. On y revoit deux maisons anciennes, les n°s 15 et 17, qui ont appartenu au sieur Coquerel.

La rue des Juifs, greffe qui s'est détachée de la rue des Rosiers sous le règne de Louis XII, n'a projeté que depuis peu d'années un de ses propres rameaux jusqu'à la rue de Rivoli. Nous y remarquons, n° 20, un magnifique hôtel déchu, où des fourneaux économiques étaient encore établis dernièrement, et nous ne désespérons pas de découvrir son origine, assurément brillante, que nous cherchons avec ténacité. Nous ne lui connaissons encore, comme anciens maîtres et seigneurs, que des Lefèvre de Léseau et de Géminy, qui étaient de la cour des aides au dernier siècle.

Maillée, peintre en émail, habitait de leur temps le n° 16 et possédait aussi le n° 14 : celui-ci avait eu pour enseigne la Croix-de-Lorraine, et celui-là, l'image de Saint-Claude. La famille du procureur Mangin-Humblot disposait, vis-à-vis, du 13.

On prêta volontiers sur gage dans l'autre rue, car écouffe ou escofle voulait dire milan, synonyme approximatif de mont-de-piété les milans étaient tenus surtout par des Lombards. Vers le milieu de cette rue, du côté des numéros pairs, voyez-vous deux portes cintrées ? L'une des deux montrait, en guise de numéro, une figure d'Aigle, alors qu'elle écartait ou rapprochait ses battants au gré du sieur Duchesne et de sa femme, Marguerite Jacquet, dont la fille Charlotte épousa le célèbre Philippe de Champagne. Jean-Baptiste de Champagne, fils de ce peintre, peintre lui-même et valet de chambre du roi, légua la maison à la belle-mère d'Hamelin, conseiller au Châtelet ; lequel vendit à Lallemand, intéressé dans les affaires du roi. Or ce même capitaliste avait, dans la ci-devant Pomme-d'Or, la propriété contiguë. Le fameux géographe Buache, gendre du géographe Delisle, établissait la division du globe par bassins de rivières et de mers, subordonnés les uns aux autres, dans un cabinet dépendant de son appartement, rue des Ecouffes. On doit croire que ce fut au 23 ou au 25.

Une petite maison de la même rue appartenait dès 1789 à un enfant mineur, qui s'appelait Baraguey d'Hilliers et qui est devenu le maréchal de France de ce nom. Sa mère, qui était sa tutrice, l'élevait là ; elle avait eu en première noces pour époux M. Nicolas Husson, conseiller du roi.

Ici finit une triple notice, que nous venons d'écrire à Bade, sur des notes prises à Paris. Et ce n'est aucunement un chef-d'œuvre du genre. Si pourtant un préfet de la Seine ou un ministre de l'intérieur avait eu à faire recueillir les renseignements que nous y rassemblons, quelle somme en eût-il coûté soit à la Ville, soit à l'État ? Un louis peut-être, mais à la condition expresse que, le préfet ou le ministre ayant placé son louis sur le 36, ce numéro-là fût sorti !



 

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