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RUE
NOTRE-DAME DES VICTOIRES ET RUE PAUL LELONG
IIe arrondissement de Paris (Histoire de Paris
rue par rue, maison par maison, Charles Lefeuve, 1875)
Notice écrite en 1860. La rue Saint Pierre-Montmartre et celle Paul-Lelong en faisaient encore deux. Commençant : place des Petits Pères, 9. Finissant : rues Feydeau, 1, et Montmartre, 141. Monument classé : Eglise Notre-Dame des Victoires. Historique : elle a porté les noms de : chemin Herbu (début du XVIIe siècle), rue des Marais, rue des Victoires (1634), rue des Pères Augustins (1647), et enfin rue Notre-Dame des Victoires ; pendant la Révolution, elle a été appelée rue des Victoires Nationales. La partie qui débouchait rue Montmartre, n° 133, est devenue la rue Brongniart. Origine du nom : longe l'église Notre-Dame des Victoires. Rue Paul Lelong commençant : rue Montmartre, 89. Finissant : rue de la Banque, 14. Historique : la partie A était précédemment dénommée rue Saint-Pierre Montmartre ; c'était : en 1601, le petit chemin Herbu ; en 1603, la rue Penecher, Péniche ou Perriche ; en 1666, la rue Saint-Pierre ; pendant la Révolution, la rue Pierre. Origine du nom : Paul Lelong (1799-1846), architecte du Timbre, de la mairie du II. arrondissement et de la caserne de la rue de la Banque ; voisinage de ces édifices. Samuel Bernard. – Les Messageries-royales. – L'Escalier qui voyage. – L'Abbé de la Victoire. – Un Souper en deux Actes. – D'Hozier. – Le Couvent des Petits-Pères. – La Bourse aux Petits-Pères. Samuel Bernard était propriétaire, rue Notre-Dame-des-Victoires, de deux maisons à tout le moins, que nous retrouvons l'une et l'autre entre les rues Saint-Pierre et Joquelet. Le n° 32 appartenait encore sous Louis XVI à un Bernard ; mais Samuel était mort en 1739, pigé de 88 ans, sans avoir fait mauvais usage des richesses considérables que lui avait rapportées l'autre siècle. Au surplus, ce prince des croquants avait été le père d'un président au parlement, Bernard de Rieux, et d'un comte de Couhert. Ledit titre de comte avait dû appartenir tout aussi bien au chef de la famille ; mais trop de gens eussent ri d'entendre le fils d'un graveur se faire annoncer de la sorte : on croyait encore, à l'époque de sa jeunesse, qu'il était presque aussi difficile au roi de faire un noble avec un roturier, qui n'avait pas porté l'épée, que de changer une fille en garçon ! Samuel Bernard ne se parait guère que de la qualité de chevalier. Sa deuxième propriété, que posséda plus tard son petit-fils, le marquis de Boulainvilliers, était vraiment un bel hôtel, dont le 28 comporte encore une portion. S'on jardin a longtemps servi d'embarcadère aux Messageries royales, avant l'exploitation des chemins de fer. Là Paris commençait à l'arrivée, finissait au départ. Que de fois une femme y mettait en voiture ou son amant ou son mari, avec des larmes dans les yeux, mais en avait d'autres à cacher, en revenant à sa rencontre ! Les Messageries impériales ont changé d'élément, pour exploiter principalement les paquebots de la Méditerrannée ; les échelles du Levant sont pour elles de simples relais l'administration, néanmoins, siège toujours au n° 28 Les bureaux du rez-de-chaussée sont maintenant au chemin de fer d'Orléans, qui ne rend pas à la cour toute son activité. En revanche, les voyageurs ne sont plus exposés à se tromper de ligne, à monter, par exemple, dans la diligence de Marseille quand leurs bagages prennent la route de Brest. L'escalier de Samuel Bernard a fini par céder lui-même aux besoins de locomotion qui dominent de plus en plus : n'est-ce pas entraîné par l'exemple, qui lui était donné de première main, qu'il a lui-même fait son petit voyage ? Les lecteurs n'auront pas grand'peine à le suivre, par le train-express de nos notices : il s'est arrêté rue Louis-le-Grand, où de nouveau il ne fit corps avec l'immeuble que par une fiction de la loi. Le passage Saint-Pierre, reliant à la rue Montmartre ladite cour, n'a été sous l'ancien régime qu'une impasse. La rue du même nom longe des propriétés qui appartiennent, elles aussi, aux actionnaires de la compagnie d'Orléans, financier collectif remplaçant aujourd'hui celui de Louis XIV. Nous y retrouverions probablement jusqu'au logis de Pierre Pénécher, qui a mis sous l'invocation de son patron cette petite rue, ainsi que le cul-de-sac. On les a percés l'un et l'autre sur le clos Gautier ou des Masures, Henri IV étant sur le trône, avec la qualification originaire de Petit-Chemin-Herbu : à cette époque se rapportent les deux niches du 4 et du 6, rue Saint-Pierre, auxquels deux madones ou deux saints ont servi d'enseigne et d'égide. Durant la Fronderie, comme dit Tallemant des Réaux, le petit Duval de Coupeauville, qui était d'une famille rouennaise de robe, avait ici ou là sa chambre. Nommé en 1639 abbé de la Victoire, il dut à ses bons mots de la réputation. Voiture l'avait présenté à la reine qui, en passant à Senlis, alla le voir dans son abbaye et le complimenta d'y avoir tout remis à neuf. Et l'abbé de répondre aussitôt : – Madame, si Votre Majesté m'en donnait encore deux où trois vieilles, je les accommoderais encore mieux. Toutefois cette petite rue était, peu fréquentée ou mal habitée en 1699, quand la police y découvrit une nichée de petits voleurs. Ce qu'on a pour 2 francs sans marchander, n° 3, rappelle de son mieux la spécialité luxurieuse qu'avaient donnée deux ou trois grands seigneurs du XVIIe siècle à des maisons de la rue et de l'impasse. Devenues des hôtels-garnis, ces maisons ont de grandes portes, sans lesquelles n'aurait pu y entrer un carrosse. Au 10, lorsqu'il était l'auberge des galanteries de Lauzun, que de nuits blanches se succédèrent ! De laquelle lui demander compte ? Levons au moins le voile qui en couvre une. Tout ce qui se passait chez Lauzun, rue Saint-Pierre, un valet l'allait rapporter à l'hôtel du lieutenant de police, qui le colportait à Versailles : arrêtons l'espion au passage, le matin du dernier lundi d'août 1770. Le maraud va nous dire ceci : – Mon maître a reçu hier soir bonne compagnie : d'abord le duc de Chartres, dont la petite-maison, rue Blanche, garde un peu mieux ses secrets que la nôtre : que ne puis-je y servir à table ! M. le prince d'Isenghien, qui n'est autre qu'un de Gand-Mérode-Montmorency, le comte d'Osmond, M. de Bézenval avaient aussi leur couvert mis à ce petit-souper, dont les autres convives faisaient corps avec le menu. La Dlle Duthé, qu'entretient maintenant le marquis de Duras, voilà pour le morceau de roi. Mon maître n'en a fait qu'une bouchée, bien qu'on le croie amoureux fou de la Dlle Audinot, laquelle vient de recevoir de ses bijoux, sans les porter toutefois devant le prince de Soubise. Les Dlles Joinville et Legrand, c'est-à-dire les maîtresses du marquis de Villette et de M. Minute, ont été remerciées honnêtement à minuit, ainsi que Mlle Duthé. C'était l'heure du relais pour elles, pour ces messieurs également : Ils m'avaient envoyé d'avance chez la Brissault, excellente maîtresse de poste : les filles Argentine et Fournier ont fait le reste du voyage. Le 15 et le 17, même rue, ont dû le jour à un serrurier en carrosses. Le marquis de Gouffier, M. de Saint-Paul, M. Cadeau, trois contemporains de Lauzun, étaient propriétaires là et tout près. Rue Notre-Dame-des-Victoires, le 42 était alors au comte de Durfort, le 30 au comte du Lude, comme le 16 au président d'Hozier, grand généalogiste de la cour, auteur avec son père de l'Armorial de France : d'autres d'Hozier successivement avaient rempli la même chargé ; la race en explorait, depuis Louis XIII, les vieux titres, pour y chercher des comtes, des écuyers, et elle faisait plus de nobles que le roi ! Maillard, ci-devant intéressé dans les gabelles, a laissé, dans un temps plus rapproché du nôtre, le 14 à son fils, un conseiller d'État. Que si des mascarons, les rampes de fer servent de chevrons aux immeubles précités, les états de service du 6 comptent encore plus de campagnes : des balustres de chêne font créneaux dans son escalier. Par conséquent, il date d'une époque où sans doute le Chemin-Herbu n'avait pas encore ceint sa robe virile de rue Notre-Dame-des-Victoires. La première pierre de l'église des Petits-Pères, placée sous cette invocation, fut posée par Louis XIII. Les Petits-Pères étaient des augustins réformés ; leur territoire longeait ladite rue et n'était séparé de la rue Vivienne que par un hôtel, du côté de notre place de la Bourse où ils ont substitué eux-mêmes des constructions au mur de jardin. Ces religieux, en plein XVIIIe siècle, étaient au nombre de 80, sans compter les novices, qui payaient de pension 400 livres. Les pères ne se doutaient guère que leur église, pendant un interrègne, se travestirait elle-même en une Bourse, à l'entrée de la rue des Victoires-Nationales. Fermée au Louvre le 13 janvier 1795, la Bourse s'ouvrit aux Petits-Pères le 19, janvier suivant, puis fut transférée au Palais-Royal le 7 octobre 1807. Peu de temps avant la suppression des monastères, M. Pajot disposait des immeubles répondant de nos jours aux premiers chiffres pairs. Tout ce côté bourgeois de la rue appartenait sous la Régence aux particuliers dont la nomenclature suit :
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