Rues et places de Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de l'histoire des rues et places de Paris : comment elles ont évolué, comment elles sont devenues le siège d'activités particulières. Pour mieux connaître le passé des rues et places dont un grand nombre existe encore.
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RUES DELABIENFAISANCE et DE ROVIGO,
VIIIe arrondissement de Paris

(D'après Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, paru en 1875)

Notice écrite en 1857. La partie entre le boulevard Malesherbes et l'avenue de Messine, précédemment appelée rue de Rovigo, a été réunie à la rue de la Bienfaisance par arrêté préfectoral du 16 août 1879. La rue de la Bienfaisance avait été dénommée rue de l'Observance, lors de son ouverture. Origine du nom : Ainsi appelée en souvenir du médecin Goetz, mort en 1813, qui habitait au n° 9 et se signala par de nombreux actes de bienfaisance. La rue de la Bienfaisance, dont le lit a été récemment approfondi et élargi, en a presque entièrement changé de physionomie et de population. Une rue Portalis la croise, avant qu'elle rencontre la rue Malesherbes à droite et l'église Saint-Austustin à gauche. Elle passait outre au boulevard Malesherbes quand au milieu de l'année 1869, on a donné le nom de Savary, duc de Rovigo, général et ministre de la police sous le premier empire, à la portion de cette rue comprise entre les boulevards Malesherbes et Haussmann, traversée par la rue de Miroménil et accostée sur le même point par la rue Treilhard. L'église et la plupart des voies publiques rencontrées par les rues de la Bienfaisance et de Rovigo sont neuves.

La maison capitale de la rue de la Bienfaisance lui a valu son nom ; c'est le n° 9, habité aujourd'hui par M. de Chasseloup-Laubat, ancien ministre. La demeurait le docteur Goetz, décédé en 1813 ; sa charité inépuisable fit modifier le nom de la rue, dite d'abord de l'Observance, après avoir été un chemin sans nom. Nous croyons que des Observantins y avaient demeuré quelques temps, au commencement du règne de Louis XVI. Ainsi se sont appelés des religieux de l'Observance, de plusieurs ordres, principalement de Saint-François. On se rappelle qu'avant la vaccine, l'inoculation était le seul préservatif de la petite vérole ; Goetz, inoculateur habile, traitait la vaccine de fléau et c'était, nonobstant ce travers, un excellent médecin, qui consacrait à secourir les indigents l'argent que lui donnaient ses malades. Son hôtel date de plus d'un demi-siècle, ainsi que le n° 7. Ce dernier est occupé par une pension de jeunes gens, que dirige M. Jacquet ; elle a été fondée par M. Rétif, nom providentiel pour un instituteur.
Un autre pensionnat est consacré aux jeunes personnes, presque en face, et cette proximité, qui convient à plus d'une famille, sourit à plus d'élèves encore dans l'une et dans l'autre maison. On s'y sent porte à porte, quelle que soit la hauteur des murs, et la moindre rencontre à la sortie ou à la rentrée, avec échange de regards ou frôlement, suffit à défrayer des rêveries solitaires ou de longues confidences, inspirant de la jalousie aux camarades comme s'il y avait de quoi. Le jardin de ces demoiselles a un air de famille avec ceux des petits hôtels du voisinage : les figuiers y dominent, et les arbres de plus Haute futaie y sont tout à fait du même âge. Comment doute que ces derniers aient appartenu autrefois à un seul et même jardin ?

Cette rue de la Bienfaisance est bourgeoise du côté de la rue du Rocher ; elle se vautre ensuite en pleine Pologne. Le pot cassé y fleurit aux croisées ; la chaise dépaillée et la vieille ferraille s'y étalent, devant les portes, en compagnie de la malle hors d'usage et de bouteilles infectées de quelques odeur qui ne partira pas. Les marchands de bric-à-Brac les plus piteux du monde sont là comme le poisson dans l'eau ; et ils font, pour renouveler leurs étalages, des échanges entre eux, tant les passants sont rares ! De grands établissements industriels raniment toutefois, matin et soir, l'extrémité populaire de la voie publique dont il s'agit.

Autrefois, dans cette même Pologne, coin écarté, les Parisiens du dimanche se grisaient à bon marché extra-muros. L'octroi a reculé le lieu de rendez-vous de ces buveurs dominicaux, et si bientôt l'enceinte de Paris englobe encore les Batignolles ; il n'y aura plus de ramponneaux possibles qu'au-delà des fortifications.


 

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