Rues et places de Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de l'histoire des rues et places de Paris : comment elles ont évolué, comment elles sont devenues le siège d'activités particulières. Pour mieux connaître le passé des rues et places dont un grand nombre existe encore.
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RUE BLANCHE,
IXe arrondissement de Paris
(D'après Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, paru en 1875)

Partie d'un ancien chemin conduisant aux carrières de Montmartre, indiqué sur le plan de Jouvin de Rochefort (1672). Précédemment rue de la Croix Blanche. En 1944, la place d'Estienne D'orves a englobé le tronçon de la rue Blanche qui était compris entre la rue de Châteaudun et la partie restante de ladite rue Blanche. Origine du nom : La rue était sillonnée par les voitures chargées de plâtre venant des carrières de Montmartre.

Notice écrite en 1857.

Chaptal. Tivoli :
Dès le 28 vendémiaire an XI, Chaptal ordonne le dégagement de la demi-lune qui forme une place devant la barrière Blanche. La rue de la Croix-Blanche, car le nom d'à présent est simplement, une abréviation, n'a eu que peu d'habitants jusque-là, dans la seconde moitié de son parcours surtout. Elle est alors bordée à gauche, précisément dans cette demi-longueur, par deux propriétés qui ont dû n'en faire qu'une. La Bouxière, fermier général, n'y a pas eu moins de 20 arpents, plantés d'arbres et clos de murs, avec un pavillon devant au crayon de Carpentier son ordonnance ionique, des pilastres et une balustrade pour couronnement.

Le square, l'église et la rue de la Trinité n'avaient pas encore enlevé ses huit ou dix premiers numéros impairs à la rue Blanche, qui est sur le point de perdre le collège Chaptal, transféré au-dessus de la gare Saint-Lazare. Du côté pair, la même rue a gagné, entre la nouvelle rue du Cardinal-Fesch et la rue Saint-Lazare une belle façade, signée Ch. Forest, 1866. De l'autre, tout eu haut, un ou deux immeubles ont servi à I'élargissement de la place semi-circulaire qui survit à la barrière Blanche, par suite de l'incorporation de Montmartre à Paris.

Richelieu. Mme Hamelin. Boursault :
N
'est-ce pas le pendant du même bâtiment, pris sur le même parc, qui rendait en dernier lieu au maréchal de Richelieu, comme villa-galante, des services moins indiscrets que son pavillon de Hanovre, dont la notoriété le fatiguait. Déjà ce prince des roués, qui tenait bon sur les ruines de sa propre génération, aurait pu être l'aïeul de la plupart des jolies filles auxquelles il faisait les honneurs de son nouveau cabinet de verdure, avec le comte de Maillebois, le Maréchal de Saxe et le prince de Conti.

Au reste, le vainqueur de Mahon, déjà octogénaire en convolant en troisième noces, s'est montré d'une humeur passablement, contraire à l'agrandissement de Paris lorsqu'il a usé de son crédit pour empêcher que d'autres fissent bâtir dans le voisinage de ce lieu de plaisance. Comme il s'exposait néanmoins à augmenter la population, il n'a pas été trop surpris que sa troisième femme devint grosse ; il n'a même pas attendu le baptême pour promettre à Fronsac, son fils, que si le nouveau-né se trouvait un gascon, il sentit fait de ce cadet un cardinal, pour ne pas diviser du moins un héritage qui menaçait de se faire attendre. Par malheur une fausse-couche a déçu les espérances de la jeune maréchale ; mais il n'y avait pas encore de quoi désespérer son mari, un enfant du XVIIe siècle qui reçut une lettre de convocation pour les États-Généraux de 1789 ! On sait, d'ailleurs, que jusqu'à la fin de sa vie Richelieu avait des maîtresses ; une des dernières lui laissa 100000 livres, par testament, et cette preuve d'amour n'était pas la moins, enviée des faveurs que la défunte avait prodiguées à un amant si expérimenté. Le mauvais sujet s'était fait si souvent des amies dévouées de ses victimes, qu'il oubliait celle-là, à son tour, et avec aussi peu d'hésitation que le jour de son adolescence où il avait jeté aux orties le premier crêpe de son mur instinctivement cuirassé.

Ce pavillon de Richelieu, dont le jardin ouvrait rue Blanche, a, sous le Directoire, appartenu à Mme Hamelin, belle créole, gronde et brune, gracieuse et spirituelle comme sa mère, Mme Lagrave, et locataire un peu plus tard du château, du parc de Raincy. Mme Hamelin ne se contentait pas de briller comme valseuse ; c'était la valse personnifiée, et Trémisse faisait sa partie il ce jeu-la, dans les salons, lui qui eut aussi l'honneur d'être le cavalier de la reine Hortense. Cour au petit pied que son hôtel, et brillante, bien que provisoire, comme l'était le gouvernement ! Cette beauté du Directoire n'a pas manqué d'approcher Bonaparte ; elle a joué un rôle politique rien qu'à recevoir les hommages de Montholon, de Perregaud, d'Ouvrard, de Moreau et d'autres personnages tellement engagés dans les partis, ou dans les grandes affaires du moment, et si nombreux qu'il n'est pas étonnant qu'on l'ait souvent accusée de cruauté !

L'ancienne résidence de Mme Hamelin d'est pas encore tombée dans le troisième dessous, par une des nombreuses trappes qu'ouvrent incessamment la Spéculation et l'expropriation. M. de Caulaincourt, dite de Vicence, en est propriétaire. La rue Moncey, par laquelle on y entre principalement, a été tracée sur ses dépendances. Le marquis de Custine, auteur d'Ethel, a occupé une maison, rue Blanche n° 57, qui se rattache à cette propriété, portant du même côté le numéro suivant. Les hôtels répondant aux chiffres 51, 53 et 55 datent d'environ, 1820 et reposent aussi sur le sol que les talons rouges du maréchal de Richelieu ont foulé.

Tout ou partie du parc La Bouxière a été exploité avant et après 1830 au profit des plaisirs publics, entre la rue de Clichy, la rue Banche et le Chemin de ronde, comme jardin Tivoli, troisième de ce nom, et il en reste des bouquets d'arbres dans un certain nombre de propriétés. La conversion de ce Tivoli en un quartier neuf date du milieu du règne de Louis-Philippe.

Du côté des numéros pairs, l'ancienne Folie-Boursault n'est plus que la rue Boursault. Du jardin de cette maison de plaisance faisait partie un quartier de terre qui, dans un bail à titre de rente foncière, consenti en 1723 par Mme de Rochechouart, abbesse de Montmartre, à Marguerite de Vertillac, veuve de Couturier, bourgeois de Paris, portait cette désignation : « aux Porcherons, rue Royale, lieu dit les Portes-Blanches. » Donc l'auteur du Mercure Galant, Édme Boursault, mort en l'année 1704, n'était pour rien dans l'occupation de cet hôtel de campagne presque à la ville. Rarement les folies d'un poète ont pour théâtre un séjour aussi princier ; mais ce Boursault ne sacrifiait pas uniquement aux muses, il était financier. L'autre Boursault se laissait prendre pour le petit-fils de son devancier fiction pardonnable à un riche traitant qui a fait jouer lui-même une tragédie de sa façon. Il avait, d'ailleurs, des manières de grand seigneur contractées sur les planches. Comédien tout d'abord, puis membre de l'Assemblée législative et de la Convention, il était devenu entrepreneur des boues et de la poudrette, puis fermier des jeux de Paris. L'involution de ses affaires avait ruiné et relevé deux fois M. Boursault, de la rue Blanche, qui eut le talent de vieillir sans perdre son amabilité : il dansait encore à quatre-vingt ans avec ses petits-enfants. La collection de fleurs de son jardin n'était pas moins admirée que les tableaux de sa galerie.

Santarem. M. Ernest de Girardin :
L
'état civil du 43 n'a pour point de départ que l'année de la prise du Trocadéro. Les plâtres du 47 n'étaient pas secs depuis longtemps, le matin du mois de janvier 1846 où l'on tendit de noir sa porte cochère pour rendre les derniers devoirs à un ancien. ministre de Don Miguel, membre ou correspondant de l'Institut de France, Manuel-Francisco de Barros-Carvalhrosa, vicomte de Santarem. Ce diplomate habitait notre ville depuis que l'orage de la guerre civile, en éclatant tout-à-coup à Lisbonne, la ville aux tremblements de terre, avait soutiré, à propos l'électricité du ciel politique de la France. N'arrive-t-il pas assez souvent qu'une révolution en Espagne, ou qu'un changement de ministère en Angleterre sauve un trône ou un portefeuille, ou une, majorité parlementaire de complaisance, dans le pays qui sépare ces deux-là ? Santarem, garce à ses disgrâces, avait eu assez de loisirs pour se mettre sur la piste d'aventures et d'intrigues du même genre dans le passé, et il avait exploré avec fruit archives et bibliothèques, tôt ou tard confidentes de tous les secrets d'Etat, qu'elles divulguent d'un régime à l'autre.

Le 45 paraît moins jeune ; mais il n'a qu'une année de plus. Que si Dante nous montre l'affamé Ugolin, qui dévore ses propres enfants afin de leur conserver un père, il arrive encore plus souvent à des maisons sorties du flanc d'une autre de manger leur mère à belles dents. Par exception, les 34 et le 32 ont respecté jusqu'ici le 36, sur les jardins duquel ils ont pris place, et qui, pas mal de temps avant d'appartenir, à M. Debelleyme, fit partie du domaine Boursault. Le 35, possédé par M. le comte Ernest de Girardin, se reconnaîtrait dans le plan de Turgot au nombre des rares hôtels, pourvus de jardins, qui s'aventuraient en 1739 aux Porcherons, par delà le château du Coq. M. de Girardin a de grands arbres dans sa propriété d'Ermenonville, mais avec lesquels peuvent se mesurer des arbres de son jardin urbain, dont les murs, par-derrière, sont tapissés de lierre séculaire. Il aime aussi les fleurs, à l'exemple de Boursault et de La Bouxière ; seulement ces devanciers n'avaient pas son talent d'en fabriquer d'autres en papier et ne cultivaient pas, comme lui, avec succès cet art d'agrément tout moderne qu'on nomme la potichomanie.

L'autre siècle a également vu la maison qui touche celle de M. de Girardin ; mais en 1830 elle à été coupée pour faire de la place à une cour, et il ne reste plus qu'un corps de l'ancien bâtiment, qui maintenant sert d'aile à l'hôtel élevé pour le général Le parois par M. Pellechet, architecte recommandable. N'allez pas croire que ce dernier ait fait comme la plupart des tailleurs à façon, qui prélevaient un habit pour eux sur le drap des meilleures pratiques ; la maison qu'il s'est érigée pour son usage est en face, au n° 30, et d'une construction antérieure de cinq années à l'exécution des ordres de son client le général.

Le Marois. La Caserne. Joubert :
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ils de cultivateur, et placé en 1793 à l'École de Mars par la protection de Letourneur, Le Marois n'avait pas treize ans lors de la chute de Robespierre, qui entraîna la suppression de l'école patronnée par ce chef du comité de Salut public. En 1793, la veille du 13 vendémiaire, Barras et Bonaparte préparaient la défense de la Convention, que menaçaient d'investir les sections réactionnaires, et déjà compromise par les hésitations du général Menou ; Bonaparte ; en passant le soir sous le pavillon de l'Horloge, y remarqua le jeune Le Marois, que le sommeil avait gagné à la porte de l'Assemblée, où-il était de service, et la figure de l'endormi lui plut. Sans les canoris du général, qui déblayèrent les abords des Tuileries, plus tôt venait le tour du Directoire et plus tard l'avancementde l'officier de fortune qui, déjà aide de camp de Napoléon, lui servit de témoin à son premier mariage. Général en 1802, comté en 1805, gouverneur de Rome, de Varsovie, etc., Le Marois n'en reçut pas moins la croix de Saint-Louis à la première restauration. Avant la campagne de Russie ; c'était un beau cavalier. Ses blessures ne lui allant pas toujours permis de changer de place, avec le théâtre de la guerre, il avait profité des relâches obligatoires pour combler les lacunes de son esprit, par les, soins de son ami intime, M. Renouf, père du journaliste du même nom. Quand sonna l'heure d'une retraite que son âge ne commandait pas, le général partagea ses loisirs entre Paris et ses terres près de Cherbourg. Mais les fruits de la guerre mûrissent sans tomber, les plus glorieuses cicatrices se ferrent sur des infirmités, et les scellés de cette nature ne se déposent qu'avec la vie. La bataille continuait entre le vaillant Le Marois et ce nouvel ennemi, car il n'en est aucun d'inexpugnable, qui tourmentait ses articulations, qui paralysait sa parole, qui le forçait à manger en tête-à-tête avec un domestique tenant l'assiette et la fourchette.

Fréquemment il mettait encore ses adversaires en déroute, et la victoire lui rapportait des heures trop courtes de liberté, de jeunesse relative, de lecture, de jeu et de superbes ressouvenirs. Mais les jours de défaite et d'abattement avaient leur tour, et brûlant une dernière amorce, si ce n'avait été une lâcheté, le combattant eût passé à l'ennemi. Les médecins n'en pouvaient mais ; les adoucissements qu'ils apportaient aux maux du général n'amenaient, pour la crise suivante, qu'un redoublement de sensibilité ; à bout de prescriptions, acculés, ils ne s'attachaient, plus à prendre que des mesures prohibitives, et ils défendaient presque tout. Ils apprirent, par exemple, que Le Marois avait une maîtresse, et l'ordonnance, plus que jamais, s'éleva au ton impératif : Le général cette fois se récria ; il assura que Mme Adèle était pour lui d'un commerce innocent, facile et sûr ; que l'inhalation sentimentale avait quelque rapport avec l'éther, agent anesthésique, et qu'enfin l'âge prescrit bien assez l'enrayure. La Faculté de reprendre aussitôt, comme au chevet de Louis XV, qu'il fallait non plus enrayer, mais dételer ; que les retours de jeunesse, dans certains cas, sont de véritables crises, prédisposant à l'asphyxie, et que les ex-citations morales et physiques à la fois peuvent, particulièrement chez un paralytique, donner au système nerveux le coup de grâce de l'intoxication et par-là mettre en un clin d'œil la vie de l'incurable au pied du mur. Cette réplique, loin d'épouvanter le général, fit briller dans ses yeux l'éclair d'une résolution bien arrêtée, et Le Marois, ayant bientôt mis ce projet du désespoir à exécution, rendit le dernier soupir dans son hôtel, le 13 octobre 1836. De sa riche succession dépendait, rue de Marivaux, l'immeuble du café Anglais. Son héritier était un fils, marié à Mlle Guidicelli, fille d'un ancien chocolatier, et ce dernier avait gagné plusieurs millions en prêtant de l'argent à des cafés et à des restaurants les jours de gêne.

Un peu plus bas que le collège Chaptal était, sous la Restauration, une raffinerie de sucre. Plus bas encore, le chiffre 5 désigne l'ancienne demeure d'un financier, Boscari de Villeplaine, nouvellement agrandie pour le marquis de Casa Riera, et dans laquelle est mort un ancien consul, le baron Pichon, père du bibliophile Pichon.

La rue Blanche a pour force armée les pompiers d'une caserne qui à servi de gymnase, à la musique militaire, après avoir été l'hôpital de la maison militaire du roi sous Louis XVIII. Ses bâtiments, que vous voyez former triangle à l'encoignure de la rue Pigalle, sont déjà dessinés sur l'ancien plan de Turgot, où rien ne fait reconnaître que ce fût un établissement public il y a 120 ans.

La Princesse de Vaudemont. L'Auteur de Richard d'Arlington :
D
u même côté, à l'angle de la rue Saint-Lazare, les passants remarquaient, sous l'Empire, un hôtel dont l'architecture était étrange ; on y avait pratiqué une porte qui, formant un cercle ou un hémicycle parfait, ressemblait à de vilaines voitures, inventées dans le même temps, qu'on appelait lunes ou demi-lunes. Joubert, fournisseur des armées, avait acquis ledit immeuble des demoiselles Pigalle, pour se l'approprier avec ce mauvais goût qui sautait aux yeux ; mais des spéculations qui tournaient mal l'obligèrent à vendre a la princesse de Vaudemont.

Mme de Vaudemont aimait la bonne musique, sans préjudice de sa passion pour les chiens ; elle promit une fois aux gens de bonne compagnie qu'elle recevait dans son salon, de leur faire entendre Mme de Mongeroult, qui s'était fait dans le monde une réputation en improvisant au clavecin. Cette virtuose de société, qui était fort capricieuse, avait promis d'avance de se rendre à l'invitation de la princesse ; elle se passe la fantaisie, en arrivant, d'annoncer qu'une migraine l'empêcherait de se faire entendre. Vif désappointement pour l'auditoire, et surtout pour des dames qui avaient fait au programme annoncé le sacrifice d'un autre emploi de la soirée et qui devinaient que la musicienne en vedette avait pour indisposition l'extrême envie de se faire prier. Mme de Vaudement fut la seule dont les instances, au milieu de la soirée, tentèrent d'apaiser les rigueurs de Mme de Mongeroult. Mais à peine celle-ci eut-elle préludé par une gamme, afin de s'assurer que le forte était d'accord, Mmes de Bauffremont et de Mailly, Mlle de Nervo et d'autres demandèrent tout haut leurs carrosses, pour tromper à leur tour l'attente de Mme de Mongeroult.

Dans une autre circonstance, la glorieuse marquise de Créqui a bien humilié, il est vrai, Mme de Vaudemont en personne. Après avoir reçu la princesse, rue d'Anjou, avec les honneurs du fauteuil, il arriva un jour que la marquise ne lui fit avancer qu'une chaise, ce qui était d'une disgrâce effroyable. Qu'ai-je donc fait à Mme de Créqui ? se demandait-elle, mais en vain. Une de ses amies pourtant lui donna le mot de l'énigme. Toute réflexion faite, la marquise ne savait pas clairement si les Vaudemont étaient une branche bâtarde ou légitime de la maison de Lorraine. La princesse de Vaudemont, pas moins, était née Montmorency.

A cette même extrémité de la rue de la Croix-Blanche se tint la petite barrière des Porcherons ; mais elle était reportée au-delà quand Mlle Dumesnil, de la Comédie-Française, prit domicile dans ces parages, probablement à l'hôtel Girardin. Nous retrouverons ailleurs cette actrice marquante, qui s'acclimata moins aux Porcherons qu'à Chaillot.

Postérieurement un auteur dramatique, M. Goubaud, dit au théâtre Dinaux, se fixa dans la rue pour plus longtemps, en y fondant la pension Saint-Victor, sous l'invocation de Victor de Lanneau, alors directeur de Sainte-Barbe. L'élève qui fait le plus d'honneur a cet établissement est Alexandre Dumas fils. Toutefois M. Goubaud ne remporta, comme chef d'institution, que des succès d'estime. Les Saint-Victor avaient leur part des prix et accessits distribués en Sorbonne et au collège Bourbon ; mais, comme tant d'autres maîtres de pension, Goubaud avait pris des boursiers tout jeunes, pour s'en faire des lauréats, et il faut croire que ces lapins savants étaient élevés trop grandement, ou ne multipliaient pas assez. Heureusement l'auteur dramatique, maire ou adjoint, officier de la barde nationale, avait des amis à la Préfecture de la Seine ; la Ville de Paris consentit à prendre la pension Saint-Victor, pour en faire le collège Chaptal, dont il fut fondateur et premier directeur.

Le Collège Chaptal. La Laiterie de l'Abbaye. Les Pensions :
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i la rue n'est pas vouée au blanc, comme l'indiquerait sa dénomination, elle n'a pas du moins à rougir de son ingratitude envers le ministre Chaptal : ne lui devant qu'une demi-lune, elle lui a donné un collège municipal, qui en vaut bien une tout entière. Croyez-vous même que ce soit tout ? Une rue Chaptal, greffée sur la Blanche, occupe l'ancien emplacement d'une vacherie, dont le lait gardait d'autant plus sa pureté et sa couleur, emblème de la candeur, qu'il était trait pour les religieuses de Montmartre. On avait transporté autre part cette laiterie dès l'année 1697, « très illustre et vertueuse princesse Marie-Anne de Lorraine » étant abbesse ; Anne Manchon, prieuré ; Madeleine Barbier, prieure du cloître ; Elisabeth Emejean, dépositaire ; Marie Bévrayère, portière ; Elisabeth Lecoq, célerière et secrétaire du chapitre.

Trois ou quatre pensions du lycée Bonaparte se sont groupées aux abords de la rue Chaptal, quoi que les humanités n'aient pas à rendre beaucoup d'hommages à la mémoire d'un chimiste. La pension Landry, qui fait le coin, arbore deux plaques indicatives de rues. Jetez les yeux un peu plus bas sur le millésime qui rappelle qu'un élève de cette institution a remporté le prix d'honneur. Ce prince des lauréats est aujourd'hui notaire dates un chef-lieu d'arrondissement, pendant que Sainte-Beuve et Ferdinand Dugué, qui également ont grandi là, poursuivent incessamment leur vocation purement littéraire.


 

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