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COSTUMES ET MŒURS A PARIS SOUS LE DIRECTOIRE
(D'après Les
Modes de Paris 1797-1897, par Octave Uzanne, paru en 1898)
Toutes les classes de la société étaient alors galvanisées par la dansomanie ; on
Jamais la nation française n'offrit aux yeux de l'observateur un spectacle plus curieux, plus incohérent, plus varié, plus inconcevable qu'au début du Directoire. La Révolution avait tout submergé : traditions, mœurs, langage, trône, autels, modes et manières ; mais la légèreté spéciale à ce peuple surnageait au-dessus de tant de ruines ; l'esprit d'insouciance, de forfanterie, d'apropos, cet immortel esprit frondeur et rieur, fonds précieux du caractère national, reparaissait au lendemain de la tourmente, plus alerte, plus vivace, plus indomptable encore qu'autrefois. Comme il ne restait rien du passé et qu'on ne pouvait improviser en un jour une société avec des convenances, des usages, des vêtements entièrement inédits, on emprunta le tout à l'histoire ancienne et aux nations disparues : chacun s'affubla, se grima, « jargonna » à sa guise ; ce fut un travestissement général, un carnaval sans limites, une orgie sans fin et sans raison.
On aura peine à imaginer qu'au milieu des victoires de Ney, de Championnet et du général Bonaparte, on n'observait dans la capitale, sur nos boulevards et places publiques, aucun enthousiasme, aucun mouvement d'allégresse. S'il faut ajouter créance aux journaux contemporains, on passait froidement, avec indifférence, à côté des crieurs annonçant les grands succès de nos généraux ; on désirait la paix, la tranquillité, l'abondance ; l'agiotage avait gagné toutes les classes, la griserie de la mascarade anéantissait toutes idées nobles. Les Ecrouelleux, les Inconcevables, les Merveilleux, le menton caché dans leurs Lorsque Junot vint apporter au gouvernement les drapeaux conquis à la bataille de la Favorite, il y fut reçu, de même que Murat, en grand apparat ; mais l'aide de camp Lavallette, dans une lettre à un ami intime, relate avec quelle pompe on procédait d'ordinaire aux petites réceptions moins extérieures.
En dehors des fêtes dédiées à la Victoire, le gouvernement des Directeurs avait, Le Luxembourg, dont les cinq Directeurs avaient pris possession, était devenu, ainsi que le remarque un poète du temps, une véritable cour ; et, comme cette cour était très accessible aux femmes, grâce au voluptueux Barras, elles y avaient apporté les manières les plus douces. La galanterie avait fait disparaître peu à peu les austérités républicaines et les femmes reprenaient largement l'empire dont elles avaient été dépossédées pendant le long règne de la Convention. Les citoyennes de Staël, Hamelin, de Château-Regnault, Bonaparte et Tallien étaient les reines de Paris, et il n'était point de fêtes sans elles. La fille du comte de Cabarrus, l'ex-épouse de M. de Fontenay, la future femme du comte de Caraman-Chimay, la belle en Tallien, semblait surtout la souveraine incontestée du Directoire ; on avait pu attacher au bas de son costume romain cet écriteau satirique : Respect aux propriétés nationales.
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