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LES PARISIENNES DE 1830
(D'après Les
Modes de Paris 1797-1897, par Octave Uzanne, paru en 1898)
Les spectateurs, assis modestement sur les bas côtés de la route, regardaient La foule allait, venait, grouillante derrière le rang des chaises on reconnaissait dans cette cohue le tailleur ou la couturière, la modiste, la lingère ou la brodeuse, le bottier et les femmes de chambre ; tout un petit monde paré et endimanché qui venait juger de l'effet des habits, des chapeaux, des robes, des rubans, des souliers fraîchement sortis de leurs mains habiles et ingénieuses. Quelques citadines numérotées circulaient presque honteusement dans cette cohue immense qui débouchait de tous les côtés de Paris, foule rieuse, jalouse de plaire, moqueuse ou approbatrice, qui saluait au passage le fronton de la
On se montrait aussi les deux équipages de M. Schickler, le premier attelé en calèche tirée par quatre magnifiques chevaux bais, montés par des jockeys dont la livrée étincelait de broderies d'or ; le second, une berline somptueuse, dont les gens portaient la grande livrée blanche. Rien ne manquait aux splendeurs de cette exhibition, pas même ce joli équipage rose et argent de Justine, si bien décrit par Louvet dans le Longchamp de Faublas ; seulement ce n'était plus alors la soubrette de la marquise de B..., que l'on voyait dans cette mirifique voiture, et le carrosse n'avait plus ni la forme rococo d'une conque marine, ni les tendres couleurs du siècle dernier, c'était quelque jeune actrice en vogue dont on admirait, sous le chapeau à larges bords, la tête mutine avec ses touffes de
On n'entendait de tous côtés que les noms de Victorine, de Burty, de Gagelin, de Palmyre, de Mme Saint-Laurent et Herbaut, les modistes et couturières en renom ; puis, dans les conversations de femmes, on surprenait des mots de Chalys-Kachemires, de crépons d'Indoustan, de batistes du Mogol, de mousselines de Golconde, de gazes de Memphis, de Chine agate, de tissus de Sandomir, de foulards de Lyon, de laines du Thibet, toute une géographie de la mode qui, elle aussi, avait ses orientales ; on faisait l'énumération des plus jolis modèles de printemps et des étoffes nouvelles, – on discutait sur le bon goût et l'élégance suprême ; – Longchamp était le grand bazar mouvant où toute belle Parisienne allait concevoir et rêver de ses prochaines toilettes. Peu à peu, à dater de 1835, Longchamp, tout en gagnant sous le rapport moral, perdit beaucoup de son aspect de somptuosité ; il dépouilla la pourpre pour se Après les belles créatures plantureuses du premier Empire, on peut dire que les petites reines de l'âge romantique ont montré des trésors d'élégance délicate et affinée, des compréhensions exquises de goût, de toilette et de recherches intimes ; elles sont plus près de nos sensations, de nos inquiétudes, de nos nerfs, de notre cérébralité, de notre psychologie, en un mot, que ne le sont les Lionnes de 1840, les rêveuses trop distinguées de 1850 ou les cocodettes du second Empire.
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