Histoire de Paris
Cette rubrique vous livre l'histoire de Paris et de ses arrondissements. Origine, évolution, de la capitale de la France. Pour mieux comprendre la physionomie du Paris d'aujourd'hui, plongez-vous dans les secrets de son passée.
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LES PREMIERS PARISIENS OU HABITANTS DE LUTECE
(D'après Paris à travers les siècles, histoire nationale de Paris et des Parisiens depuis la fondation de Lutèce jusqu'à nos jours, paru en 1879)

Les arènes de Paris. – Le palais des Thermes. – Les cimetières . – Les aqueducs et le bassin. – Costumes des Parisiens. – Leurs coutumes. – Les Huns. – La vierge de Nanterre. – Childéric. – Clovis. – Paris capitale.

« Pendant les cent cinquante ans, dit M. du Sommerard, qui s'écoulèrent depuis cette acquisition jusqu'à la construction de l'hôtel de Cluny, par Jehan de Bourbon et Jacques d Amboise, on ignore quelle fut la destination des bâtiments. Toujours est-il qu'a la fin du XVe siècle il ne restait plus de cet immense édifice, intact trois siècles auparavant, que les salles qu'on voit aujourd'hui et qui ont conservé le nom de palais des Thermes. A cette époque, l'hôtel de Cluny vint s'élever sur une partie des fondations romaines, et les salles antiques encore debout furent

Tourelle de l'hôtel de Cluny
conservées comme dépendances par les abbés de Cluny qui demeurèrent propriétaires de tout le domaine jusqu'à la fin du siècle dernier. »

Ce fut en effet abbé Jean, bâtard du duc de Bourbon, qui jeta les premiers fondements de l'hôtel de Cluny ; mais il mourut le 2 décembre 1485 laissant son œuvre incomplète. Elle fut terminée par Jacques d'Amboise. Dès les premiers jours de 1515, peu de temps après l'achèvement des travaux de restauration de l'hôtel de Cluny, la veuve du roi Louis XII, Marie d'Angleterre, alla passer l'année de son deuil à cet hôtel, dont elle fit sa résidence sur l'invitation du roi François Ier. « Le dict sieur Roy donna ordre, dit Jean Barillon, secrétaire du cardinal Duprat, que la royne Marie, veuve du roi Louis dernier, décédé, fust honorablement entretenue : laquelle royne se vint loger en l'hostel de Cluny et ledict sieur la visitoit souvent et faisoit toutes gracieusetés qu'il est possible de faire. »

La chambre habitée par cette princesse a conservé jusqu'à nos jours le nom de chambre de la reine Blanche (les reines de France portaient le deuil en blanc, ce qui explique pourquoi plusieurs logis habités par les reines sont désignés sous le nom de logis de la reine blanche ; ce qui a été cause de l'erreur commise par certains historiens qui ont cru qu'il s'agissait de la mère de saint Louis). Peu d'années après, l'hôtel de Cluny fut le théâtre d'un événement qui lui donna une consécration plus royale encore : le mariage de Madeleine, fille de François Ier, avec Jacques V roi d'Écosse. « Le dimanche dernier de décembre 1536, Jacques, roi d'Écosse, fit son entrée à Paris et vint loger en l'hostel de Cluny-lès-Mathurins, où le roi l'attendait, et le lendemain, 1er janvier, il épousa Madeleine. »

Parmi les autres personnages illustres, dont le séjour à l'hôtel de Cluny est constaté par les chroniques, on doit citer les princes de la maison de Lorraine, entre autres le cardinal de Lorraine, son neveu le duc de Guise et le duc d'Aumale, en l'an 1565 ; le nonce du Pape en 1601, et l'illustre abbesse de Port-Royal-des-Champs, en 1625. Les pierres tumulaires de Simon de Gillans, abbé de Cluny, mort le 6 septembre 1349, et celle de Jehan de Sarthenay, conseiller du roi, mort à Paris le 26 septembre 1360, tous deux enterrés dans l'ancienne église collégiale de Cluny, ont été retirées de cette église lors de sa démolition et données au musée de Cluny en 1852 par M. Seguin, marbrier. Malgré la somptuosité de leur hôtel, les abbés de Cluny y résidèrent rarement ; en 1579, une troupe d'acteurs s'y installa, et il fallut un arrêt du Parlement pour les enexpulser en 1584.

En 1681 il est occupé par le légat du Pape. Devenu propriété particulière lors de la Révolution de 1789, l'hôtel de Cluny fut aliéné à des industriels qui enserrèrent ce qui restait du palais des Thermes par des constructions et l'enterrèrent sous une couche de terré végétale ; un jardin le couvrait et les racines des arbres qui y croissaient disjoignaient les pierres de la voûte romaine qui servait de cave à un tonnelier. En 1807 un décret impérial aliénait les restes du palais des Thermes à l'hospice de Charenton. La sollicitude de Louis XVIII sauva ces ruines ; déjà en 1818 le duc d'Angoulême avait conçu le projet d'en former un musée gallo-romain, le roi ordonna la démolition des maisons qui obstruaient le monument, dans lequel on pénétrait par la porte cochère d'une maison de la rue de la Harpe.
En 1819, le préfet de la Seine fit l'acquisition des immeubles au nom de la ville ; les terres qui pesaient sur la voûte furent enlevées et dès 1820 les travaux de

L'ancien Palais des Thermes IVe siècle
consolidation commencèrent, en même temps qu'avaient lieu des fouilles qui amenèrent des découvertes intéressantes.

Néanmoins on ne donna pas suite au projet primitif. En 1831 on le reprit, mais ce fut encore pour l'abandonner ; or en 1833, un amateur éclaire des monuments des siècles passés, M. du Sommerard fit choix de ce vieux manoir pour servir d'asile aux précieuses collections d'objets d'art du d'études. En 1842, époque de la mort du célèbre antiquaire, et sur le vœu exprimé par là commission des monuments historiques, le ministre de l'Intérieur, M. lé comte Duchâtel, présenta un projet de loi peur l'acquisition de cette belle collection destinée à devenir la première base d'un musée d'antiquités nationales. L'hôtel de Cluny fut choisi pour être le siège elle ce nouveau musée, et la ville de Paris s'associant à cette fondation artistique, et archéologique, offrit à titre gratuit au gouvernement les ruines du palais des Thermes. La collection du Sommerard et l'hôtel Cluny furent acquis par l'État, en vertu de la loi du 24 juillet 1843, et le nouveau musée fut immédiatement constitué sous le nom de musée des Thermes et de l'hôtel de Cluny.

A partir de ce moment, la communication qui reliait jadis les ruines du palais à l'ancienne résidence des abbés de Cluny fut rétablie. Des travaux de restauration furent entrepris et les galeries de l'hôtel, défigurées depuis deux siècles et transformées en appartements modernes, furent remises dans leur état primitif, les sculptures furent dégagées, les collections d'objets anciens classées et disposées à la place que leur assignait leur âge et le musée fut ouvert au public pour la première fois, le 16 mars 1844. Depuis lors il n'a cessé de s'enrichir de dons faits par des particuliers, des objets importants ont été offerts au musée par les administrations de l'État, entre autres par celles des Forets, des Ponts et Chaussées, de l'Instruction publique et des Cultes, et par les ordres des préfets de la Seine, tous les fragments historiques découverts dans les travaux exécutés par la ville ont pu y être transportés, pour y être conservés, et leur réunion forme un ensemble d'un intérêt véritable pour l'histoire de l'ancien Paris.

La partie de l'édifice, que le temps a le mieux épargnée, est la grande salle voûtée qui était celle où se prenaient les bains froids, aussi l'appelait-on frigidarium. On voit encore les restes des canaux qui conduisaient l'eau dans les baignoires, un égout de dégagement, portait à la Seine les eaux qui avaient servi aux bains. Cette salle est d'un grand effet ; là haute arcature des voûtes retombe sur des consoles dont la forme simule des proues de navire ; en en sortant, et pour arriver à l'ancien Tepidarium, salle voûtée dans le principe, et dans laquelle on retrouve toutes les niches qui renfermaient les baignoires, on traverse une petite pièce qui s'élève au-dessus d'un caveau ; à droite il en existait une autre dont on voit encore les traces.

Le Tepidarium forme aujourd'hui l'extrémité des ruines du côté du boulevard de Saint-Michel ; en descendant quelques marches on trouve une construction massive en briques plates, calcinées, ce sont les, fondations de l'hypocaustum placé d'ordinaire au centre de la salle de bains, c'était le fourneau qui servait au chauffage de l'eau, au moyen de récipients placés au-dessus et dont l'eau qu'ils contenaient allait se distribuer dans les baignoires. Derrière cet hypocaustre est le conduit romain qui servait de canal. Les restaurations en pierre de taille que l'on remarque sur le mur de cette salle faisant face au boulevard, ont été

Plan de la ville de Paris de César à Clovis
exécutée comme travaux de soutènement et de consolidation en 1820 sur la demande du duc d'Angoulême. Ce fut à la même époque que fut détruit le jardin qui couronnait l'édifice.

« La façade principale de l'hôtel de Cluny, lisons-nous, dans la Notice historique due à M. E. Dusommerard, directeur da musée, se compose d'un vaste corps de bâtiment flanqué de deux ailes qui s'avancent jusqu'à la rue des Mathurins. Sa porte d'entrée, ornée autrefois d'un couronnement gothique richement sculpté, conserve encore un large bandeau décoré d'ornements et de figures en relief. Au-dessus du mur régnait une série de créneaux, ainsi qu'on peut en juger par ceux qui ont pu être conservés. Ces créneaux ont été rétablis, et la porte d'entrée a repris en partie son premier aspect. Les bâtiments de la façade principale sont surmontés d'une galerie à jour derrière laquelle s'élèvent de hautes lucarnes richement décorées de sculptures et qui présentaient dans leurs tympans les écussons de la famille d'Amboise, écussons dont il reste encore des traces bien appas rentes.

Vers le milieu du bâtiment principal s'élève une tourelle à pans coupés que couronne une galerie analogue à celle qui décore les autres parties de l'édifice ; sur les murs de cette tourelle on trouve sculptés en relief les attributs de saint Jacques, les coquilles et les bourdons les pèlerins, allusion au nom du fondateur Jacques d'Amboise. L'aile droite est percée de quatre arcades ogivales qui donnent accès dans une salle communiquant directement avec les Thermes ; cette salle, dont les murs sont de construction romaine, était une dépendance du palais ; sa couverture antique n'a été renversée qu'en 1737 et a été remplacée dans ces dernières années. Les bâtiments du rez-de-chaussée de l'aile gauche renfermaient les cuisines et les offices de l'hôtel. Auprès de cette partie de l'édifice, on aperçoit, tracée sur le mur, la circonférence de la fameuse cloche appelée Georges d'Amboise, destinée à la cathédrale de Rouen et coulée en fonte dans la cour de l'Hôtel de Cluny.

 


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