Monuments, édifices de Paris
Cette rubrique vous narre l'origine et l'histoire des monuments et édifices de Paris : comment ils ont évolué, comment ils ont acquis la notoriété qu'on leur connaît aujourd'hui. Pour mieux connaître le passé des monuments et édifices dont un grand nombre existe encore.
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VUE GÉNÉRALE DE PARIS A VOL D'OISEAU
(D'après Paris, 450 dessins inédits d'après nature, paru en 1890)

Peu d'années après, l'architecte lyonnais Philibert de l'Orme, attaché au service du du pape Paul III, revenait à Paris et développait aux yeux enchantés de la reine Catherine de Médicis les plans de son génie abreuvé aux sources de Bramante et de Michel-Ange ; l'architecte romain fut compris par la reine florentine, et voilà comment, dès l'année 1570, le pavillon central du palais des Tuileries mira dans la Seine étonnée le plus ancien des dômes pari-siens, dôme elliptique en projection horizontale, couronné par une lanterne, ayant pour amortissement une fleur de lis d'or, chef-d'œuvre de grâce et d'élégance, qui disparut dès le règne de Henri IV, sous les lourdes surcharges que lui imposa l'architecte Androuet du Cerceau, successeur de Philibert de l'Orme et de Jean

Dôme des Invalides.
Bullant. Ce qu'Androuet du Cerceau avait fait pour les Tuileries et Philibert de l'Orme, Jacques Le Mercier le fit pour le pavillon central du Louvre, conçu par Pierre Lescot ; c'est d'ailleurs Jacques Le Mercier, l'architecte favori du cardinal de Richelieu, qui fut l'initiateur des dômes parisiens sous le règne de Louis XIII ; la priorité appartient, je crois, à l'église Saint-Joseph des Carmes, rue de Vaugirard, commencée en 1613, puis au palais du Luxembourg, commencé en 1615, et à l'église des Petits-Augustins, qui date de 1617 ; viennent ensuite les dômes de la Sorbonne, entrepris en 1635, achevé en 1653 ; du Val-de-Grâce, dont la construction se place entre les dates de 1634 et de 166o. A partir de celui-ci, les dômes ne se comptent plus ; l'horizon nous offre, je cite sans choix et sans ordre, les dômes de la Salpêtrière, des Invalides, de la chapelle du Collège Mazarin, où siège l'Institut, du Panthéon, de l'Assomption, de Saint-Augustin, de Pentemont, sans compter les dômes ou, pavillons prismatiques du Tribunal de Commerce, de l'École militaire et le polygone pyramidal de l'église grecque au faubourg Saint-Honoré.

Et tandis que les formes halo-byzantines se développent sur nos têtes, les flèches tombent l'une après l'autre, celle-ci par le feu du iel, celle-là par la main des hommes,plus meurtrière et moins clairvoyante que la foudre. De savantes restitutions ont relevé la flèche de Notre-Dame et celle de la Sainte-Chapelle ; Paris doit aux architectes modernes les clochers de Sainte-Clotilde, de Belleville, de Montrouge, etc. Faibles compensations pour tant d'irréparables pertes, infligées à la vieille capitale par le vandalisme officiel qui a sévi sur elle depuis le règne de Louis XIV, où l'on proscrivit le gothique comme un souvenir des temps barbares, jusqu'aux dernières époques contemporaines.

A mesure que les flèches s'émoussaient ou s'étêtaient, que les dômes se boursouflaient sous la dorure, les carrés de. pierre pullulaient et envahissaient avec une rapidité contagieuse les divers quartiers de la ville toujours grandissante ; plus de pignons aigus, bientôt plus de toitures ; ici des combles en

Flèche de la Sainte-Chapelle.

arc de cercle, se terminant par une surface plane, ailleurs les vitrages des grandes gares de chemins de fer, des grands magasins de nouveautés, des grandes maisons de banque, parmi lesquelles se confondent sous le regard la plupart des établissements publics, des écoles et même des musées.

Cette constatation était inévitable dans une vue d'ensemble. A la hauteur où je nous suppose placés, -au-dessus de la Basilique sacrée ou de l'Arc triomphal, nous sommes bien forcés de nous apercevoir que le soleil nous darde des rayons aveuglants et meurtriers et se réfléchissant sur les immenses surfaces vitrées qui recouvrent ici les gares d'Orléans, de Lyon ou du Nord, ailleurs le palais de l'Industrie et le musée du Louvre.

Néanmoins, le spectacle est grandiose. Partout le mouvement, le frémissement, l'intensité de la vie : la Seine est incessamment sillonnée de bateaux à vapeur chargés de touristes, de péniches chargées de marchandises, de chalands, de trains de bois et de remorqueurs ; le tracé extrême de la ville se devine aux hautes cheminées d'usine, dressant leurs colonnes de feu vers le ciel parisien, qui demeure, malgré tout, d'un bleu tranquille, riant et gai. Cette agglomération de deux millions deux cent cinquante-six mille êtres humains, ayant pour atelier, pour ruche et pour demeure quatre-vingt-quatre mille maisons, n'est pas une ville ; c'est un peuple, disons mieux, c'est un monde, mais un monde incessamment mobile et chatoyant, un kaléidoscope de quinze lieues de tour, pour reprendre un mot d'Honoré de Balzac, en l'amplifiant jusqu'aux superficies actuelles.

Paris fait de tout, et vit de tout : il rit de tout aussi, et c'est son privilège ; son

Panthéon, clocher de Saint-Étienne du Mont et Tour de Clovis.
honneur, sa gloire et son profit sont cependant ailleurs que dans sa perpétuelle raillerie. Paris a versé sur le monde entier le meilleur de l'esprit français ; mais la ville natale de Molière, de Boileau, de Regnard, de Voltaire et d'Alfred de Musset n'est pas moins célèbre par ses aptitudes universelles à tous les arts, à toutes les industries, à tout ce qui demande de l'ingéniosité, de la finesse et ce sentiment intime des proportions en toute chose qu'on appelle « le goût ». En remontant le cours des âges, et retrouvant de siècle en siècle, jusqu'aux origines de la nationalité française, cette même renommée parisienne déjà formée par le consentement universel de l'Europe barbare, on est amené par la force des choses à se poser cette question, ou plutôt - cette série de problèmes connexes : « D'où vient Paris ? Qui a fait Paris ? Pourquoi Paris ? ».


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