Monuments, édifices de Paris
Cette rubrique vous narre l'origine et l'histoire des monuments et édifices de Paris : comment ils ont évolué, comment ils ont acquis la notoriété qu'on leur connaît aujourd'hui. Pour mieux connaître le passé des monuments et édifices dont un grand nombre existe encore.
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L'ÉGLISE DE SAINT-GERMAIN DES PRÉS
(D'après Paris, 450 dessins inédits d'après nature, paru en 1890)

A l'extérieur, la vieille église s'annonce par un porche mesquin, construit au XVIIe siècle et surmonté d'une grosse tour carrée ; à son plus haut étage, deux baies cintrées du XIIe siècle, accompagnées de colonnes, s'ouvrent sur chacune de ses quatre faces et laissent échapper les vibrations de ses cloches sonores ; terminée par une haute flèche couverte en ardoises, la tour de Saint-Germain des Prés, avec ses arceaux romans, domine majestueusement cette région de Paris, qui est née et s'est développée sous son ombre. Un souvenir curieux s'y rattache : le 2 novembre 1589, Henri IV, assiégeant Paris, monta au sommet de

Le palais de la rue de l'Abbaye
la tour, accompagné d'un seul religieux, pour examiner la situation de la ville ; il fit ensuite le tour du cloître sans entrer dans l'église, et se retira sans dire un mot.

Dans les angles du choeur et du transept, on aperçoit à droite, du côté du boulevard Saint-Germain, et à gauche, du côté de la rue de l'Abbaye, deux masses carrées, s'arrêtant à la naissance de la voûte : c'est la base des deux autres tours, qui donnaient une physionomie originale à Saint Germain des Prés et l'avaient fait surnommer l'église aux trois clochers ; elles ont été détruites en 1822, sous Louis XVIII, « par économie », afin d'épargner les frais de leur restauration ; et si on les a laissées subsister dans leur partie inférieure, c'est qu'elles ont paru nécessaires comme appui de l'église.

Le côté nord de celle-ci est isolé par une rue dite de l'Abbaye, ouverte en l'an VIII à travers le magnifique cloître dont il ne subsiste plus que l'aile droite, appuyée à l'aile gauche de l'église. Au bout de la rue de l'Abbaye, derrière le choeur de l'église, s'élève le palais abbatial construit vers 1586 par le cardinal de Bourbon. On admire son imposante façade, en briques et pierres, décorée de refends, de pilastres et de frontons ; au sommet du pavillon de gauche, une femme assise tient un écusson aux armes du fondateur.

Le palais abbatial est habité depuis longtemps par l'industrie privée. Au droit du palais abbatial, une courte et large rue descend de la rue de l'Abbaye à la rue Jacob. Ouverte en 1699, elle porte le nom du cardinal de Furstenberg, qui fut abbé de Saint-Germain des Prés. Elle était encadrée originairement par les communs du palais ; la grande maison n° 6 en conserve la livrée architecturale, briques et pierres. Habitée par des artistes, et renfermant des ateliers spacieux, elle a vu mourir le grand peintre Eugène Delacroix.

L'aile occidentale du cloître renfermait la bibliothèque de Saint-Germain des Prés, la plus considérable de Paris en ce temps-là, et qui était ouverte au public ; commencée par le P. du Breul, l'historien des Antiquités de Paris, elle avait reçu par dons testamentaires les bibliothèques du médecin Noël Vaillant, de l'abbé Baudran, de l'abbé Jean d'Estrées, de l'abbé Renaudot, du chancelier Séguier, du cardinal de Gesvres, du conseiller d'État de Harlay, et de M. de Coislin ; ensemble cent mille volumes imprimés et vingt mille manuscrits, qui ont été versés à la Bibliothèque nationale.

De l'autre côté du palais abbatial, en marge du boulevard Saint-Germain, sur la face occidentale de la place Gozlin, s'élevait la prison de l'Abbaye, témoin des massacres du 2 septembre 1792 ; avant la Révolution, elle était particulièrement affectée aux gardes françaises ; plus lard, elle reprit cette destination, généralisée aux soldats de toutes armes, jusqu'à l'époque où les anciens bâtiments du couvent du Bon-Pasteur, rue du Cherche-Midi, furent convertis en prison militaire. Devant la prison de l'Abbaye s'élevait le pilori, signe visible de la

Le marché Saint-Germain
justice seigneuriale qui appartenait aux abbés sur tout le bourg Saint-Germain ; et devant le pilori s'ouvrait la rue de la Foire, devenue rue de Bissi, aujourd'hui rue Montfaucon.

Le marché Saint-Germain, qui remplace la célèbre foire de ce nom, a été créé par décret impérial du 30 janvier 1811 ; la première pierre en fut posée le 15 août 1813 et il fut mis en exploitation en 1818. Il a la forme d'un quadrilatère, environnant une grande cour au centre laquelle on a transporté une fontaine qui se trouvait autrefois sur la place Saint-Sulpice. C'est une espèce de cippe carré, orné de quatre bas-reliefs, représentant le Commerce, l'Agriculture, les Sciences et les Arts, sculptés par Espercieux. Le marché, construit par l'architecte Blondel, se compose de quatre grands corps de bâtiments, de 13 mètres de profondeur ; la cour mesure 65 mètres sur 48. La superficie totale est de 8,816 mètres. Les quatre rues qui l'entourent ont reçu les noms de Félibien, Lobineau, Clément et Mabillon, quatre des plus savants historiens qui aient illustré l'abbaye de Saint-Germain des Prés.

La foire Saint-Germain, que le marché a remplacée, avait elle-même été construite par les abbés, à qui les rois de France en avaient concédé le privilège, sur les jardins de l'hôtel de Navarre, compris en 1386 dans la confiscation des biens de Charles le Mauvais, traître à la France et complice d'Étienne Marcel. La foire Saint-Germain, qui durait deux mois, du 3 février au 3 avril, et qui alternait avec la foire Saint-Laurent son aînée, fut le berceau de plusieurs théâtres parisiens. On n'y vit d'abord que des montreurs de marionnettes, dont Brioché fut le plus célèbre, des animaux féroces ou domestiques, des sauteurs et danseurs de corde ; la fermeture, par ordre, de la Comédie-Italienne fit éclore l'Opéra-Comique, qui, né à la foire, exilé, rétabli, finalement triomphant, émigra un

Une marchande ambulante
moment à la rue de Buci, à côté de la boutique du pâtissier Quillet, puis se fixa dans une vraie salle à la rue de Bissi, ainsi nommée du cardinal-abbé de Saint-Germain qui avait fait construire un marché en avant du préau de la foire.

La rue de Bissi, aujourd'hui Montfaucon, semblait continuer la rue de Buci, de L'autre côté du boulevard Saint-Germain actuel ; de là des confusions fréquentes chez les annalistes du théâtre. Au XVe siècle, la foire Saint-Germain tenait directement au petit jardin du presbytère de l'église Saint-Sulpice ; le marché en est aujourd'hui séparé par la rue Saint-Sulpice, ouverte dans sa partie orientale par le cardinal abbé de Bourbon dont elle porta longtemps le nom, tandis que la partie occidentale débouchant sur la place Saint-Sulpice s'appela rue de l'Aveugle, puis des Aveugles, en souvenir d'un riche aveugle qui possédait en 1595 plusieurs maisons en bordure de l'église, et que celle-ci racheta plus tard à ses héritiers.


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