Monuments, édifices de Paris
Cette rubrique vous narre l'origine et l'histoire des monuments et édifices de Paris : comment ils ont évolué, comment ils ont acquis la notoriété qu'on leur connaît aujourd'hui. Pour mieux connaître le passé des monuments et édifices dont un grand nombre existe encore.
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LE PALAIS DE L'INSTITUT
(D'après Paris, 450 dessins inédits d'après nature, paru en 1890)

A la suite de la première cour, une seconde cour, en forme de long parallélogramme, s'étend jusqu'à la rencontre de la rue Mazarine ; elle est terminée par un petit mur et une fontaine construite par Vaudoyer, et que surmonte une tète de Minerve casquée, adoptée comme type pour toutes les

Les bords de la Seine et collège des Quatre-Nations
(Palais de l'Institut)
marques de l'Institut ; le bâtiment qui borde cette cour du côté gauche et s'étend, par derrière les maisons du quai Conti, jusqu'aux bâtiments de la Monnaie qu'elle prend en écharpe, renferme la salle des séances ordinaires, précédée ou ornée des statues de Chateaubriand, de Percier, de Volney, d'Arago, de Puget, de Molière, de La Fontaine, etc., etc. ; et aussi la Bibliothèque de l'Institut, qui possède 180,000 volumes et 1,600 manuscrits, mais qui n'est accessible aux personnes étrangères à l'Institut que sur la présentation de deux académiciens. On voit dans cette Bibliothèque la statue de Voltaire par Pigalle entièrement nue ; son aspect décharné justifie le soin qu'on a pris de la soustraire aux regards de la foule.

Le bâtiment de droite renferme les logements des cinq secrétaires perpétuels et du personnel administratif de l'Institut ; le pavillon de droite, qui a son entrée sur la place Conti, parallèle à l'entrée de la cour d'honneur, est habité par les administrateurs et conservateurs de la Bibliothèque Mazarine. Quoique tous les services de l'enseignement des beaux-arts aient été transportés depuis longtemps à l'École des beaux-arts de la rue Bonaparte, il subsiste quelques ateliers d'artistes au rez-de-chaussée de la grande cour de l'Institut, près de la sortie latérale sur la rue Mazarine.

Au moment de la Révolution, il existait cinq Académies ou réunions permanentes et choisies d'hommes attachés au culte de la littérature, de la science et des arts. La plus ancienne était l'Académie française, fondée par Richelieu, et distinguée entre toutes par le titre de française, qui était son titre d'honneur et d'indépendance, car toutes les autres étaient qualifiées de royales : royale des belles-Iettres, royale des sciences, royale de peinture et de sculpture, royale d'architecture. La Révolution les supprima, même l'Académie française, comme entachées d'aristocratie.

Cependant, lorsque la France, délivrée des atrocités de la Terreur, commençait à

Le Palais de l'Institut (Collège des Quatre Nations)
et la Galerie du Louvre
rechercher parmi les ruines amoncelées les éléments d'une reconstruction nécessaire, l'article 298 du titre X de la Constitution de l'an III créa un Institut national chargé de recueillir les découvertes, de perfectionner les arts et les sciences. Il fut organisé dans l'avant-dernière séance de la Convention nationale, le 25 octobre 1795, sous la forme d'une compagnie de cent quarante-quatre membres, divisée en trois classes : les Sciences positives, les Sciences politiques, la Littérature et les Arts. Il fut installé au Louvre, le 11 avril 1796, dans les locaux des anciennes Académies. Le Premier Consul le réorganisa, le 24 janvier 1803, en quatre classes : Sciences, Littérature, Littérature ancienne, Beaux-Arts. Sous cette forme, la Restauration n'eut qu'un nom à changer, et les quatre classes de l'Institut impérial redevinrent des Académies. La cinquième, celle des Sciences morales et politiques, créée par la Convention, fut rétablie en 1832, sur la proposition de M. Guizot, ministre de l'instruction publique.

Néanmoins, le principe de l'Institut subsiste. Indépendantes l'une de l'autre dans leur régime intérieur et la libre disposition de leurs biens, les cinq Académies sont liées par la gestion commune de l'agence, du secrétariat, de la Bibliothèque, des collections et des autres biens mobiliers et immobiliers qui appartiennent collectivement à l'Institut. Jusqu'à l'année 1887, l'Institut n'avait possédé aucun immeuble, car les bâtiments et le sol de l'ancien collège Mazarin sont la propriété de l'État. Il a fallu un acte du pouvoir exécutif pour autoriser l'Institut à accepter, selon la généreuse volonté du duc d'Aumale, la donation du domaine de Chantilly avec ses inestimables collections de livres et d'objets d'art. Enfin, l'unité des cinq Académies est affirmée chaque année par une séance solennelle, dont la présidence est dévolue successivement à chacun des cinq présidents.

C'est un lieu commun que de médire des Académies. Les cinq anciennes comme les cinq nouvelles ont rendu les plus grands services aux sciences et jeté le plus vif éclat sur la littérature et les arts. On en convient assez. généralement lorsqu'il s'agit en particulier de l'Académie des sciences, ou de l'Académie des inscriptions. Il n'est pas un savant étranger, pour illustre qu'il soit, qui ne recherche l'honneur d'en devenir l'associé ou le correspondant. L'Académie des sciences a eu sa part de tous les progrès scientifiques, et l'on doit à l'Académie des inscriptions, comme à ses vaillants explorateurs, l'immense développement des études puniques, égyptiennes, assyriennes, persanes, etc.

Serait-ce trop dire qu'elle a créé l'épigraphie, cette résurrection de l'histoire par les pierres ? Le dissentiment commence si l'on parle de l'Académie des beaux-arts, que nous retrouverons bientôt au centre de son enseignement pratique. L'Académie des sciences morales trouve encore grâce aux yeux des censeurs ; il sort des travaux de ces idéologues plus de nuages que de lumière ; mais ils ne font aucun mal et ne s'ennuient qu'entre eux. L'Académie française, au contraire, est l'objet avoué de toutes les convoitises, en même temps que le but de toutes les flèches de l'épigramme et de la moquerie, chez les hommes de lettres surtout, on pourrait dire chez eux seuls.

Tandis que les sciences morales occupent les loisirs des esprits les plus divers, députés, ministres, professeurs, publicistes, philosophes, jurisconsultes, agriculteurs, etc., venus des quatre vents de l'horizon, les hommes de lettres,

Le Pont Neuf et le collège des Quatre-Nation
(Palais de l'Institut)
dominés par une arrière-pensée professionnelle, approuvent rarement les choix de l'Académie française. Les avocats leur sont suspects d'ignorer la littérature et les ducs de mépriser l'orthographe. Au contraire, l'Académie appelle-t-elle « dans son sein » un dramaturge, un romancier, un journaliste ou un critique, le journalisme, ne manque pas de s'écrier : « Pourquoi celui-là plutôt que celui-ci, pourquoi mon confrère, mon ami peut-être, et non moi-même ? » Ces récriminations et ces censures n'ont pas entamé l'autorité ni l'éclat de l'Académie française, peut-être même l'ont-elles préservée de certains entraînements en diminuant dans ses conseils secrets I'influence des coteries. La pensée du cardinal de Richelieu, en la créant, fut d'affirmer l'unité de la langue française, et par conséquent celle de la patrie, et de donner au talent un lien d'égalité avec l'éclat du rang, de la noblesse ou des services publics.

En voyant briller, parmi les académiciens d'aujourd'hui, les noms de nos principaux écrivains ou de nos poètes, tels qu'Émile Augier, Octave Feuillet, Alexandre Dumas, Jules Simon, Gaston Boissier, Camille Doucet, Victorien Sardou, Ernest Renan, Maxime Ducamp, Sully Prudhomme, Pailleron, François Coppée, on s'assure que des prélats tels que Mar Perraud, des historiens comme le duc de Broglie, des avocats éloquents et probes comme M. Rousse, et de grands hommes d'action comme M. Ferdinand de Lesseps, le perceur d'isthmes, ont leur place marquée sur ses fauteuils séculaires, et que la pensée du cardinal de Richelieu n'a pas cessé d'être comprise. L'homme de lettres, si pénétré qu'on le suppose des grands principes de 1789 et désabusé des hochets de la vanité, n'est pas fâché, lui, l'humble fils de ses œuvres, de se constater publiquement l'égal d'un duc, et le duc savoure le plaisir délicat de se dire, comme un simple homme de lettres, « l'un des quarante de l'Académie française », écrivît-il accadémie par deux cc .


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