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MONTMARTRE
(D'après Les
environs de Paris illustrés,
par Adolphe Joanne paru en 1856)
L'histoire de Montmartre ne se compose que de sièges et de batailles. Toutes les armées qui ont attaqué Paris ont occupé tour à tour cette forteresse naturelle, les Normands s'y installèrent. Othon II vint y camper (978). Il ordonna à ses soldats de respectes tous les édifices consacrés au culte. Seulement pour tenir l'engagement qu'il avait contracté envers Hugues Capet, alors prudemment enfermé dans Paris, « de lui chanter un Alleluia, si haut et si fort, qu'on n'en aurait jamais ouï de semblable, » il fit entonner le cantique Alleluia te martyrum, etc., par une multitude de clercs auxquels répondaient en chœur des milliers de combattants. Un chroniqueur prétend que Hugues et tout le peuple de Paris, saisis de stupéfaction, en eurent les oreilles assourdies. Othon s'avança au galop jusqu'aux fossés de Paris, et darda sa lance dans la porte de la ville en disant : « Jusqu'ici, c'est assez. » Toutefois il ne tenta point l'assaut, et, après diverses escar-mouches, croyant son honneur satisfait, il commanda la retraite. Lors du siège de Paris, en 1592 Henri IV fit braquer des canons sur une terrasse qui passait pour un débris du temple de Mars, et il envoya un certain nombre de projec-tiles à ses futurs sujets. En 1814, Montmartre ne fut pas défendue. Quand, après avoir repoussé une première attaque, les défenseurs de Belleville et des buttes Chaumont virent s'avancer sans s'émouvoir les 100 000 soldats nouveaux amenés par Blücher, il n'en fut pas de même, dit M. Ac. de Vaulabelle, de quelques spectateurs enfermés dans un pavillon du Château-Rouge... « Six pièces de canon, deux obusiers, quelques détachements de cavalerie, un bataillon de sapeurs-pompiers et 150 ou 200 gardes nationaux, voilà tous les moyens de défense réunis à Montmartre. Quand j'arrivai à Montmartre », raconte le duc de Rovigo dans ses Mémoires, « je ne fus pas peu surpris de n'y trouver aucune disposition de dé-fense. » Éloignée de plus de trois quarts de lieue du théâtre de la bataille, dont la séparaient d'ailleurs les deux canaux de l'Ourcq et de Saint-Denis, les villages de la Villette et de la Chapelle, la butte Montmartre ne fut pas inquiétée, même par les éclaireurs de l'ennemi, pendant la plus grande partie de la journée du 30 mars. Ce fut à cet observatoire que le roi Joseph, lieutenant général de l'Empereur, accompagné du ministre de la guerre, Clarke, vint se placer pour juger et attendre les événements... Lorsque, vers une heure, le duc de Raguse fit dire à Joseph que les positions où il s'était jusqu'alors maintenu commençaient à être forcées, et qu'un des corps amenés par Blücher s'avançait par Romainville, Ménilmontant et Charonne ; quand ce prince, plongeant lui-même, ses regards sur la plaine Saint-Denis aperçut les nouvelles troupes qui noircissaient au loin la campagne, il chargea deux de ses officiers de porter aux maréchaux quelques lignes qu'il avait écrites une heure auparavant ; et, abandonnant à tous les hasards de la lutte le gouvernement, Paris et ses héroïques défenseurs, il s'élança au galop sur les boulevards extérieurs et prit la route de Versailles, accompagné de Clarke. « Dans ce moment un officier général, accourant à franc étrier, paraît devant le Château-Rouge et demande Joseph à grands cris. On le lui montre au milieu d'un groupe de cavaliers qui s'éloignaient de toute la vitesse de leurs chevaux, dans la direction du bois de Boulogne. Ce général s'élance sur les traces des frères de l'Empereur. C'était le général Dejean, que Napo-léon avait envoyé à Joseph, pour lui annoncer son retour à Paris et lui enjoindre de tenir jusque-là. Il atteignit Joseph au milieu du bois de Boulogne et lui rendit compte de sa mission. « Il est trop tard, » lui dit Joseph, « je viens d'autoriser les maréchaux à traiter avec l'ennemi ». Le général Dejean eut beau le presser de retirer cet ordre, d'en suspendre au moins l'exécution ; après plusieurs refus, Joseph enfonça ses éperons dans le ventre de son cheval et reprit sa course, toujours suivi par Clarke. Ils rendaient à Blois où était déjà l' Impératrice. » Cependant Blücher, ne pouvant pas croire que Montmartre n'était pas fortifiée, s'en approchait avec les plus grandes précautions. Ce fut à trois heures seulement que ses premiers détachements parurent au pied de la butte. Quelques boulets et quelques obus furent lancés contre eux ; mais à quatre heures il ne restait plus un homme armé sur ce point. Blücher l'occupa immédiatement en force et, à quatre heures et demie, huit pièces de canon que nos soldats y avaient laissées étaient tournées contre Paris et jetaient sur les faubourgs les plus rapprochés des boulets et des obus. Le soir même toutes les plates-formes de la butte étaient hérissées de batteries. En 1815, la butte Montmartre avait été fortifiée, mais elle ne fut pas attaquée, une trahison ayant livré aux alliés le pont de Saint Germain. Les Anglais ravagèrent les vignes de Clignancourt, comme l'avaient déjà fait leurs ancêtres en 475, et ils en furent punis par les mêmes souffrances. Depuis lors la ville de Montmartre n'a plus fait parler d'elle.
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